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23/12/11 Valentin Petkantchin

           Le crédit qui sauve et le crédit qui tue !

Les difficultés des banques, menacées de faillite, les poussent à réduire leurs bilans et les crédits qu’elles font à l’économie. Pourtant, les pouvoirs publics et les banquiers centraux sont décidés à maintenir à tout prix cette expansion du crédit. Ils multiplient les interventions visant à s’assurer que celui-ci continue à couler « à flot ».

Or l’École autrichienne d’économie, dite École de Vienne, et dont les représentants ont parfaitement prédit la crise actuelle tout comme celle de 1929, considère que ces politiques pourraient avoir des conséquences désastreuses pour votre capital et vos économies.

La foi des autorités publiques actuelles dans l’expansion du crédit paraît quasi-mystique.
Keynes, leur maître à penser, y voyait déjà un moyen miraculeux permettant de transformer, s’amusait-il à dire, « une pierre en pain ». De même, suite à l’intervention concertée des banques centrales du mercredi 30 novembre dernier, le ministre de l’Économie et des Finances, François Baroin, espérait que cela permettrait aux banques de « financer sous forme de crédit l’activité économique et les particuliers ».

L’expansion du crédit en question ne repose pas sur la constitution au préalable d’une épargne plus importante. L’épargne est au contraire volontairement pénalisée par des politiques de taux d’intérêt faibles et de relance de la consommation (ce qui est consommé ne peut évidemment pas être épargné !).

Le système bancaire est-il en mesure de financer l’économie en multipliant le crédit à partir de rien ?

L’idée derrière l’expansion du crédit relève en réalité de la pensée magique. Persister dans cette voie n’est pas une solution à la crise mais risque au contraire de l’aggraver. Comment ?

Tout d’abord, comme le soulignait Ludwig von Mises, l’un des fondateurs et chefs de file de l’École autrichienne, « toute discussion sérieuse au sujet du problème de l’expansion du crédit doit commencer par la distinction entre deux catégories de crédit ». Une telle distinction conceptuelle entre commodity credit et circulation credit est nécessaire car ils n’ont pas les mêmes conséquences en matière de prix, de taux d’intérêt, de pouvoir d’achat de la monnaie et de cycles économiques.

D’une part, il y a ce que l’économiste autrichien appelle, le commodity credit, soit le volume des prêts correspondant aux fonds propres des banques et à l’épargne que les déposants leur confient. Il s’agit, par définition, de fonds prêtables qui sont transférés des mains de ceux qui les ont épargnés pour être mis à la disposition d’entrepreneurs afin d’améliorer leurs capacités productives. L’adage d’antan « les dépôts font les prêts » fait ainsi référence à cette idée de commodity credit.

D’autre part, il y a le circulation credit correspondant au volume de crédits non adossés à une épargne existante et créé à partir de manipulations monétaires. Les banques peuvent, par exemple, accorder un crédit à une entreprise ou à un ménage en ouvrant simplement un nouveau compte de dépôt et en le créditant de la somme accordée — une opération ne nécessitant de nos jours que quelques clics. Il s’agit littéralement de crédit, et de monnaie fiduciaire, créés à partir de rien. Autrement dit, le circulation credit, c’est quand « les crédits font les dépôts ».

Quels sont les effets économiques de ces deux catégories de crédits et en quoi diffèrent-ils ?

Considérons d’abord le cas du commodity credit. De par sa nature, il correspond à l’évidence à un simple transfert d’argent qui, au lieu d’être consommé, est investi dans l’économie. On retrouve ainsi le rôle traditionnel d’intermédiation bancaire qui consiste à faciliter ce transfert entre épargnants et entreprises ayant besoin de fonds pour investir.

Le commodity credit est à l’image du crédit fournisseur que les entreprises s’accordent entre elles. L’entreprise créditrice renonce à encaisser immédiatement le paiement de son produit faisant ainsi profiter pour une période donnée l’entreprise débitrice du montant du paiement reporté. Cette dernière est ainsi en mesure – grâce à cette opération de crédit – de financer, par exemple, une partie de son équipement afin d’augmenter ses capacités de production.

Le commodity credit adossé à l’épargne existante est donc, comme le qualifie l’analyste financier Frank Schostak, un « bon crédit » indispensable pour une réelle croissance économique. Il n’implique pas de gonflement de la masse monétaire et donc pas de baisse du pouvoir d’achat de la monnaie qui viendraient fausser la valeur réelle de vos économies en tant qu’investisseur. Il ne peut faire l’objet d’expansion par le seul bon vouloir des pouvoirs publics ou des banques. Il n’est pas non plus la cause de cycles économiques perturbant l’économie et les bourses.

Quant à l’autre catégorie de crédit, le circulation credit, c’est tout le contraire. Celui-ci correspond en réalité à une pure création monétaire inflationniste qui présente plusieurs effets pernicieux. C’est lui qui fait toujours l’objet d’une expansion par les interventions des pouvoirs publics.

Premièrement, il fournit plus de monnaie dans l’économie qu’il ne devrait y en avoir, puisque les fonds prêtables et les capacités existantes de production n’ont pas augmenté. Résultat ? Les prix des matières premières et de la main-d’œuvre ont tendance à augmenter, surtout dans les secteurs où les crédits sont distribués en premier.

Quand « les crédits font les dépôts », la bulle immobilière gonfle

Quand ce sont les ménages et les particuliers qui profitent de l’expansion du crédit, les prix des biens financés par ces crédits tendent à s’envoler à l’image de l’immobilier. À cause de l’expansion du crédit, le pouvoir d’achat de la monnaie diminue : vos économies deviennent alors de moins en moins suffisantes pour acquérir ainsi un logement ou tout autre bien sur le marché.

Mais ce n’est pas tout. Selon les économistes autrichiens cette expansion du crédit est la cause même des cycles de « boom-récession ». L’expansion se fait par une baisse des taux d’intérêt sur le marché. Ceci envoie un faux signal aux entrepreneurs en les poussant à s’engager dans des nouveaux projets d’investissement qui, bien qu’ils puissent « booster » les chiffres du PIB à courte échéance, ne sont rentables qu’en apparence, leur rentabilité ne dépendant que de cette baisse artificielle des taux.

En l’absence d’épargne supplémentaire, cette période de « boom » n’est pas durable. Les banques centrales interviennent d’ailleurs généralement pour relever leurs taux d’intérêt et durcir leur politique, l’inflation devenant de plus en plus manifeste.

La « bulle » provoquée par l’expansion du crédit ne tarde pas alors à éclater, révélant au grand jour les mauvais investissements et les erreurs faites lors du « boom ».

Face aux dégâts, la réaction naturelle des acteurs économiques est d’essayer de reconstituer le stock d’épargne, condition nécessaire pour retrouver une croissance pérenne. Cette attitude est considérée comme récessive par les pouvoirs publics et les banquiers centraux qui cherchent à la contrer par une politique de taux zéro.

« Si l’expansion du crédit n’est pas arrêtée à temps (…), le refuge dans les valeurs réelles commence, et c’est tout le système monétaire qui s’effondre », nous prévient Ludwig von Mises.

Valentin Petkantchin


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