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	Le crédit qui sauve et le crédit qui tue ! 
	 
	Les difficultés des banques, menacées de faillite, les poussent à réduire 
	leurs bilans et les crédits qu’elles font à l’économie. Pourtant, les 
	pouvoirs publics et les banquiers centraux sont décidés à maintenir à tout 
	prix cette expansion du crédit. Ils multiplient les interventions visant à 
	s’assurer que celui-ci continue à couler « à flot ». 
	 
	Or l’École autrichienne d’économie, dite École de Vienne, et dont les 
	représentants ont parfaitement prédit la crise actuelle tout comme celle de 
	1929, considère que ces politiques pourraient avoir des conséquences 
	désastreuses pour votre capital et vos économies. 
	 
	La foi des autorités publiques actuelles dans l’expansion du crédit paraît 
	quasi-mystique.  
	Keynes, leur maître à penser, y voyait déjà un moyen miraculeux permettant 
	de transformer, s’amusait-il à dire, « une pierre en pain ». De même, suite 
	à l’intervention concertée des banques centrales du mercredi 30 novembre 
	dernier, le ministre de l’Économie et des Finances, François Baroin, 
	espérait que cela permettrait aux banques de « financer sous forme de crédit 
	l’activité économique et les particuliers ». 
	 
	L’expansion du crédit en question ne repose pas sur la constitution au 
	préalable d’une épargne plus importante. L’épargne est au contraire 
	volontairement pénalisée par des politiques de taux d’intérêt faibles et de 
	relance de la consommation (ce qui est consommé ne peut évidemment pas être 
	épargné !). 
	 
	Le système bancaire est-il en mesure de financer l’économie en 
	multipliant le crédit à partir de rien ? 
	 
	L’idée derrière l’expansion du crédit relève en réalité de la pensée 
	magique. Persister dans cette voie n’est pas une solution à la crise mais 
	risque au contraire de l’aggraver. Comment ? 
	 
	Tout d’abord, comme le soulignait Ludwig von Mises, l’un des fondateurs et 
	chefs de file de l’École autrichienne, « toute discussion sérieuse au 
	sujet du problème de l’expansion du crédit doit commencer par la distinction 
	entre deux catégories de crédit ». Une telle distinction conceptuelle 
	entre commodity credit et circulation credit est nécessaire 
	car ils n’ont pas les mêmes conséquences en matière de prix, de taux 
	d’intérêt, de pouvoir d’achat de la monnaie et de cycles économiques. 
	 
	D’une part, il y a ce que l’économiste autrichien appelle, le commodity 
	credit, soit le volume des prêts correspondant aux fonds propres des 
	banques et à l’épargne que les déposants leur confient. Il s’agit, par 
	définition, de fonds prêtables qui sont transférés des mains de ceux qui les 
	ont épargnés pour être mis à la disposition d’entrepreneurs afin d’améliorer 
	leurs capacités productives. L’adage d’antan « les dépôts font les prêts » 
	fait ainsi référence à cette idée de commodity credit. 
	 
	D’autre part, il y a le circulation credit correspondant au volume de 
	crédits non adossés à une épargne existante et créé à partir de 
	manipulations monétaires. Les banques peuvent, par exemple, accorder un 
	crédit à une entreprise ou à un ménage en ouvrant simplement un nouveau 
	compte de dépôt et en le créditant de la somme accordée — une opération ne 
	nécessitant de nos jours que quelques clics. Il s’agit littéralement de 
	crédit, et de monnaie fiduciaire, créés à partir de rien. Autrement dit, le
	circulation credit, c’est quand « les crédits font les dépôts ». 
	 
	Quels sont les effets économiques de ces deux catégories de crédits et en 
	quoi diffèrent-ils ? 
	 
	Considérons d’abord le cas du commodity credit. De par sa nature, il 
	correspond à l’évidence à un simple transfert d’argent qui, au lieu d’être 
	consommé, est investi dans l’économie. On retrouve ainsi le rôle 
	traditionnel d’intermédiation bancaire qui consiste à faciliter ce transfert 
	entre épargnants et entreprises ayant besoin de fonds pour investir. 
	 
	Le commodity credit est à l’image du crédit fournisseur que les 
	entreprises s’accordent entre elles. L’entreprise créditrice renonce à 
	encaisser immédiatement le paiement de son produit faisant ainsi profiter 
	pour une période donnée l’entreprise débitrice du montant du paiement 
	reporté. Cette dernière est ainsi en mesure – grâce à cette opération de 
	crédit – de financer, par exemple, une partie de son équipement afin 
	d’augmenter ses capacités de production. 
	 
	Le commodity credit adossé à l’épargne existante est donc, comme le qualifie 
	l’analyste financier Frank Schostak, un « bon crédit » indispensable pour 
	une réelle croissance économique. Il n’implique pas de gonflement de la 
	masse monétaire et donc pas de baisse du pouvoir d’achat de la monnaie qui 
	viendraient fausser la valeur réelle de vos économies en tant 
	qu’investisseur. Il ne peut faire l’objet d’expansion par le seul bon 
	vouloir des pouvoirs publics ou des banques. Il n’est pas non plus la cause 
	de cycles économiques perturbant l’économie et les bourses. 
	 
	Quant à l’autre catégorie de crédit, le circulation credit, c’est 
	tout le contraire. Celui-ci correspond en réalité à une pure création 
	monétaire inflationniste qui présente plusieurs effets pernicieux. C’est lui 
	qui fait toujours l’objet d’une expansion par les interventions des pouvoirs 
	publics. 
	 
	Premièrement, il fournit plus de monnaie dans l’économie qu’il ne devrait y 
	en avoir, puisque les fonds prêtables et les capacités existantes de 
	production n’ont pas augmenté. Résultat ? Les prix des matières premières et 
	de la main-d’œuvre ont tendance à augmenter, surtout dans les secteurs où 
	les crédits sont distribués en premier. 
	 
	Quand « les crédits font les dépôts », la bulle immobilière gonfle 
	 
	Quand ce sont les ménages et les particuliers qui profitent de l’expansion 
	du crédit, les prix des biens financés par ces crédits tendent à s’envoler à 
	l’image de l’immobilier. À cause de l’expansion du crédit, le pouvoir 
	d’achat de la monnaie diminue : vos économies deviennent alors de moins en 
	moins suffisantes pour acquérir ainsi un logement ou tout autre bien sur le 
	marché. 
	 
	Mais ce n’est pas tout. Selon les économistes autrichiens cette expansion du 
	crédit est la cause même des cycles de « boom-récession ». L’expansion se 
	fait par une baisse des taux d’intérêt sur le marché. Ceci envoie un faux 
	signal aux entrepreneurs en les poussant à s’engager dans des nouveaux 
	projets d’investissement qui, bien qu’ils puissent « booster » les chiffres 
	du PIB à courte échéance, ne sont rentables qu’en apparence, leur 
	rentabilité ne dépendant que de cette baisse artificielle des taux. 
	 
	En l’absence d’épargne supplémentaire, cette période de « boom » n’est pas 
	durable. Les banques centrales interviennent d’ailleurs généralement pour 
	relever leurs taux d’intérêt et durcir leur politique, l’inflation devenant 
	de plus en plus manifeste. 
	 
	La « bulle » provoquée par l’expansion du crédit ne tarde pas alors à 
	éclater, révélant au grand jour les mauvais investissements et les erreurs 
	faites lors du « boom ». 
	 
	Face aux dégâts, la réaction naturelle des acteurs économiques est d’essayer 
	de reconstituer le stock d’épargne, condition nécessaire pour retrouver une 
	croissance pérenne. Cette attitude est considérée comme récessive par les 
	pouvoirs publics et les banquiers centraux qui cherchent à la contrer par 
	une politique de taux zéro. 
	 
	« Si l’expansion du crédit n’est pas arrêtée à temps (…), le refuge dans 
	les valeurs réelles commence, et c’est tout le système monétaire qui 
	s’effondre », nous prévient Ludwig von Mises. 
	 
	Valentin Petkantchin  
	 
	 
	 
	
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