Des millions de piscines individuelles
converties en patinoires par la faute des Keynésiens
"La connaissance peut ętre communiquée mais pas la sagesse", disait
Hermann Hesse. Nous sommes abreuvés, sinon abrutis, par le discours
keynésien en faveur d'une relance mondiale.
Paul Krugman, le lauréat du prix Nobel d'économie, en remet une couche
aujourd'hui dans son article " Cinquante Herbert Hoover". Dans sa diatribe,
il compare les cinquante gouverneurs des États de l'Union au président
républicain Herbert Hoover de 1929 ŕ 1933. De quoi se sont rendus coupables
les gouverneurs aux yeux du nouveau pape des keynésiens ? De réduire les
dépenses de leur État. Pour la défense des gouverneurs, Krugman invoque le
fait qu'ils seraient tenus par une loi d'avoir des budgets équilibrés. Il
faudrait donc que ce fusible saute pour relancer la dépense. Je me demande ŕ
quelle loi il se réfčre. Arnold Schwarzenegger est parvenu au poste de
gouverneur de la Californie, le 7 octobre 2003, en raison de l'énorme dette
de cet État. Les électeurs ont sanctionné l'ancien gouverneur Gray Davis par
la procédure unique en son genre de recall, qui est un référendum
demandant la destitution du gouverneur.
Albert Einstein prononça cette phrase géniale que nous autres, militants
de la Révolution bleue, aimons souvent citer : « On ne rčgle pas les
problčmes avec ceux qui les ont créés ». Dans son excellente enquęte (un
texte capital sur la débâcle financičre de vingt-et-une pages que j'ai pris
la peine de traduire intégralement en deux journées de onze heures chacune
de travail : 25 et 26 décembre), John Cassidy a interrogé beaucoup d'acteurs
et de personnalités dans le monde de la finance pour nous offrir une vision
équilibrée des responsabilités. Voici un passage saillant qui montre la
responsabilité des keynésiens dans la crise actuelle.
"Bernanke fournit la justification intellectuelle ŕ l'approche
non-interventionniste de la Fed ŕ l'égard des bulles", m'a dit Stephen Roach,
le président du bureau de l'Asie de Morgan Stanley, qui était parmi les
économistes pressant la Fed d'ajuster sa politique. "Il a joué aussi un rôle
clé dans le développement de la théorie du "surplus d'épargne dans le
monde", que la Fed a utilisée comme une excuse trčs commode pour dire que
nous faisions au monde une grande faveur en maintenant notre demande. Avec
le recul, nous n'avions pas un surplus d'épargne au niveau mondial, nous
avions un surplus de consommation en Amérique. Dans tous les cas, Bernanke
était complice dans les bourdes colossales commises par la Fed."
Cette fumeuse théorie du "surplus d'épargne dans le monde" est un avatar
du keynésianisme. Elle a permis aux ménages et ŕ l'État américain de vivre
trop longtemps aux crochets du reste du monde. Cette bulle a éclaté. Que
proposent les Krugman, Fitoussi et consorts ? Tout simplement de recommencer
la męme erreur, mais ŕ une échelle plus grande. Comme je l'ai écrit dans mon
article du 18 décembre 2008 (« L'Amérique peut-elle ętre sauvée ? »), je
crains que ce soit la derničre relance keynésienne avant un krach mondial
qui déclenchera inévitablement des guerres ŕ travers le monde. Les
événements en Grčce sont un prélude de ce qui nous attend en Europe, avec
des bandes bien organisées de trotskystes saccageant tous les symboles de la
société honnie : universités, écoles, bibliothčques, hôpitaux, crčches,
casernes de pompiers, gares, etc.
Une amie de Sacramento, qui est la capitale de la Californie, me dit au
téléphone, alors que je l'appelais pour lui souhaiter Thanksgiving,
ce que pensent les contribuables californiens : "Schwarzenegger n'a rien
fait pour redresser les finances, il a endormi l'opinion publique en
rééchelonnant la dette. Les tueries ŕ répétition (une nouvelle vient juste
de se produire ŕ Noël) sont les signes avant-coureur d'une désintégration de
notre société. Le film apocalyptique "Mad Max", tourné en 1979 en Australie,
oů l'on voit des bandes de motards extręmement violents écumer les routes,
est notre hantise."
Il est bien connu que le malheur des uns fait le bonheur des autres. Dans
cette męme édition du 29 décembre 2008, le New York Times évoque le sort des
piscines californiennes. En raison d'un nombre invraisemblable de saisies de
maisons dans cet État, les fans du skate-board s'en donnent ŕ cśur joie !
Ils ont l'embarras du choix pour s'adonner ŕ leur passion. Ils ont découvert
que les piscines modernes aux courbes naturelles constituent un excellent
terrain de jeu. A Fresno, une ville d'un million d'habitants, Josh Peacock,
un fan de 27 ans, a déclaré : "Nous avons tant de piscines que nous ne
savons qu'en faire !" Des fans d'Allemagne et d'Australie viennent en
Californie se livrer aux joies du patinage. Grâce ŕ la toile, qui met ŕ jour
les maisons faisant l'objet d'une saisie (confer les sites realtor.com ou
realquest.com), ils sont informés en temps réel. Sur un site des fans, on
peut lire : "God bless Greenspan, patron saint of pool skating" (Dieu
bénisse Greenspan, le saint patron des piscines de patinage)
Josh, lui, est sur le terrain. Il se promčne avec son matériel pour vider
les piscines environnantes. Il dispose d'une pompe alimentée par un moteur ŕ
explosion. Grâce ŕ la crise, le prix ŕ la pompe d'un galon d'essence est
tombé ŕ 1.87 $ alors qu'il était de plus de 4 $ en juillet. Il a une pelle
et un grand balai pour nettoyer le fond de la piscine. Aprčs deux jours de
séchage, la piscine est pręte. Męme les ménages qui parviennent encore ŕ
rembourser leur pręt hypothécaire ne peuvent plus se permettre l'entretien
d'une piscine.
Les fans ne sont pas menacés de poursuite judiciaire. Ils invoquent le
fait qu'ils accomplissent une mission de salubrité publique en vidant une
piscine non entretenue. Elle attire les rats et les ratons laveurs et c'est
aussi un endroit idéal pour la reproduction des larves de moustique. "Nous
combattons le virus du Nil ŕ notre façon", ont déclaré les skate-boarders.
Une loi californienne peut infliger une amende de mille dollars au
propriétaire d'une piscine non entretenue. Afin de ne pas avoir d'ennuis
avec le shérif, les patineurs se conforment ŕ une éthique qu'ils ont
élaborée eux-męmes : pas de graffiti, ramasser ses ordures aprčs la fęte et
ne jamais entrer ŕ l'intérieur d'une maison saisie.
La piscine est un trčs bon exemple des mauvais investissements dénoncés
par l'école autrichienne. Dans mon article du 25 novembre 2008 (« La fuite
en avant nous conduit ŕ la catastrophe) », j'ai repris la parabole que nous
a léguée l'économiste Ludwig von Mises ŕ propos de l'entrepreneur
imprévoyant. Elle s'applique parfaitement ŕ la Californie, oů l'on a
construit des millions de piscines individuelles qui ne servent plus ŕ rien,
si ce n'est ŕ assouvir la passion des fans d'un sport marginal. Sur un plan
économique, cela aurait coűté cent fois moins d'argent de construire des
kilomčtres de pistes de skate-board ŕ la place de ces piscines individuelles
que nous autres, contribuables américains et européens, allons rembourser
pendant des années ŕ travers une hausse inéluctable de nos impôts.
Il en sera de męme avec les plans de relance de Barack Obama, Sarkozy et
consorts. Notre épargne va ętre dilapidée pour faire plaisir ŕ une
pseudo-élite qui tire justement son pouvoir de la dépense publique. Tout se
tient dans le meilleur des mondes.
Bernard Martoďa
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