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Un plan de survie pour la France

16/7/05 ClaudeReichman
" Tout récemment, lors d'un petit dîner privé à l'Elysée, l'un de ses hôtes demanda sans détour à Jacques Chirac ce qu'il pensait des livres qui sortiraient sur lui dans quelques années. Il répondit, avec un sourire ironique : " De toute manière, je ne serai plus là pour les lire, mais sans doute ce sera terrible. " " Ce récit figure dans un livre paru en 2002 et qui se voulait pourtant à la gloire du couple Chirac. Le destin aura voulu que Jacques Chirac vive cette épreuve " terrible " de son vivant. Car à lire les éditoriaux qui paraissent en ce moment, même sous la plume de soutiens naguère zélés, on se dit que celui qui, pour près de deux ans encore, préside la République n'est vraiment qu'un bon à rien. En vérité, il n'a été bon qu'à conquérir le pouvoir, mettant au service de son ambition un appétit et un dynamisme exceptionnels, joints à une capacité rare à susciter des dévouements et à un cynisme absolu que seule l'inconscience parvient un peu à tempérer. Mais aujourd'hui le roi est nu et ce n'est plus un enfant isolé qui le dit mais la nation tout entière.

Ce n'est pas son entretien télévisé du 14 juillet qui enrayera sa descente aux enfers. Le président de la République s'y est montré encore plus creux et vain que d'habitude. Pendant le défilé militaire, il était apparu tendu et inquiet, tandis que dans son dos Sarkozy rigolait et faisait des mimiques que n'eût pas désavouées Louis de Funès. Ah ! que la République est belle quand un loup plus jeune met toute son ardeur à assassiner le chef de la meute !

Car ne nous y trompons pas : c'est d'un combat pour le pouvoir et de rien d'autre qu'il s'agit. Quand Sarkozy en appelle à " la France qui gronde ", il feint d'ignorer qu'après trente ans de vie politique ininterrompue, il est responsable tout autant que les autres politiciens du pitoyable état de notre pays. Mais de même qu'on a pu voir, quand s'effondrait le communisme, des dirigeants des " démocraties populaires ", mouillés jusqu'au cou dans les turpitudes et les crimes du système, se parer avec impudence d'une légitimité révolutionnaire, de même des Sarkozy ou des Bayrou espèrent faire oublier leur permanente participation à la fête en s'inventant des projets politiques qu'ils n'ont jamais mis en oeuvre ni même proposés quand ils avaient le pouvoir de le faire.

La classe politique est en miettes

La France est affrontée à l'une des plus graves crises de son histoire. Car elle se défait littéralement sous les coups que lui porte une modernisation mondiale dont elle n'a pas pris la mesure et que ses dirigeants politiques sont incapables d'expliquer au peuple, afin de le disposer aux grands changements qui s'imposent. La campagne référendaire a donné une illustration tragique de ce grand blocage national. Les partis dits de gouvernement, tous favorables au oui, nous ont expliqué qu'il fallait à la fois poursuivre la construction communautaire et en refuser les conséquences, faisant un épouvantail de la fameuse directive Bolkestein qui se borne pourtant, pour l'essentiel, à rassembler et à harmoniser des dispositions existant depuis longtemps, et pour beaucoup d'entre elles depuis le traité de Rome ! Du même coup, ils ont donné raison aux adversaires les plus bornés de la liberté économique et sociale, qui se sont fait une joie de rendre l'Europe responsable de tous nos maux. Le non dès lors ne pouvait que l'emporter, d'autant que l'appoint décisif lui est venu des libéraux que le constructivisme du projet constitutionnel, qui visait à redonner aux Etats et aux syndicats le contrôle des libertés conquises par les individus et par les peuples pendant près d'un demi-siècle de construction européenne, ne pouvait que repousser.

Aujourd'hui, la classe politique française est en miettes et le pays est à la recherche d'une nouvelle représentation. Celle-ci doit pouvoir exprimer les aspirations de la classe moyenne, comme dans toutes les nations modernes. Il appartiendra aux nouveaux dirigeants du pays de réaliser les quelques grandes réformes sans lesquelles la France n'a pas la moindre chance d'avenir. Il va falloir réduire progressivement mais rapidement d'une bonne centaine de milliards d'euros les dépenses de l'Etat et des régimes sociaux, diminuer de moitié le nombre des fonctionnaires, ouvrir à la concurrence la protection sociale, l'école et les transports publics, changer le recrutement des juges en privilégiant l'expérience de la vie, ranimer et renforcer nos forces militaires afin de les rendre capables de faire face aux nouveaux défis du monde moderne, et décréter une longue période d'immigration zéro d'une part pour arrêter la vague actuelle qui, au rythme de 350 000 à 400 000 nouveaux arrivants par an, est en train de submerger toutes les structures du pays, lesquelles n'ont jamais été conçues pour une telle épreuve, et d'autre part pour parvenir à intégrer puis à assimiler les immigrés présents dont on sait bien que, dans leur immense majorité, ils ne repartiront pas.

Il ne s'agit pas là d'un programme politique mais d'un plan de survie de la nation. Ce que Margaret Thatcher et Ronald Reagan - qui trouvent chaque jour en France de nouveaux laudateurs dans les rangs de ceux qui, il y a quelques semaines à peine, n'avaient pas de mots assez durs à leur égard - ont su faire pour la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, nous devons le faire pour la France. Dans cette vaste et exaltante entreprise, notre adversaire n'est pas le peuple, qui aspire à ce grand changement et le juge indispensable, mais la classe politique, qui y voit la fin de son règne. Par chance, l'alliance de celle-ci avec la classe médiatique est en train de voler en éclats. Les journalistes en effet sont en train de comprendre que la survie de leurs médias ne dépend plus de la faveur du pouvoir mais de leur adéquation avec la volonté populaire. Et c'est fou ce que ce genre de sentiment vous rend soudain intelligent !

Claude Reichman

 

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