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14/12/13 Norman Podhoretz
      Il faut attaquer l’Iran maintenant pour éviter
                      une catastrophe plus tard !

Il n'y a pas si longtemps, presque personne n'était en désaccord avec John McCain quand il disait que « la seule chose qui soit pire que de bombarder l'Iran est de laisser ce pays se doter de la bombe nucléaire ». Aujourd'hui presque tout le monde est d'accord avec ceux qui disent que la pire chose serait de bombarder l’Iran pour l’empêcher d’acquérir l’arme nucléaire. Un conte de fées est à l’origine de ce renversement de l’opinion.

L’ancien consensus a été marqué par trois considérations, qui toutes semblaient incontestables à l'époque.

La première était que l'Iran mentait quand il niait que ses installations nucléaires visaient à construire une bombe. Après tout, avec ses vastes réserves de pétrole et de gaz, le pays n'aurait pas besoin de l'énergie nucléaire. Même la Fédération libérale des scientifiques américains disait, il y a une décennie, que le travail effectué dans les installations nucléaires iraniennes était facilement réversible en un programme de développement d'armes nucléaires. Étonnamment, un jugement similaire avait été porté par Mohamed El Baradei, le très accommodant directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique.

La seconde considération était que le risque d’être anéanti par une frappe de représailles avait dissuadé les Soviétiques et les Chinois de déclencher une attaque nucléaire pendant la guerre froide. Mais cette idée serait inefficace face à un Iran dirigé par des mollahs chiites fanatiques. Comme Bernard Lewis, le meilleur spécialiste de l'islam contemporain, l’a fait valoir en 2007, la destruction mutuelle assurée n'est pas dissuasive pour ces fanatiques. C’est au contraire une incitation. Nous savons, depuis la guerre entre l’Iran et l’Irak, qu'ils n’accordent aucune valeur à la vie humaine et n’ont pas hésité à envoyer leur propre peuple se faire tuer en grand nombre. (1) Ils lui donnent ainsi un laissez-passer rapide vers tous les plaisirs qui l’attendent au paradis.

Les dirigeants de l'Iran n’ont jamais été dissuadés par la crainte que leur pays soit détruit, un jour, dans une guerre nucléaire. Cela se vérifie dans les mots de l'ayatollah Khomeiny, qui a instauré la révolution islamiste en 1979 : « Nous ne vénérons pas l'Iran, nous adorons Allah .... je dis que ce pays [ l'Iran ] peut partir en fumée, mais à la condition que l’islam émerge triomphant dans le reste du monde. » Cette citation a paru, en 1981, dans une publication iranienne des discours de l'ayatollah. Dans des éditions ultérieures, cette ligne et d'autres ont été supprimées, alors que l'Iran essayait de réveiller la ferveur nationaliste en plein milieu de sa guerre contre l'Irak.

A propos d'un conflit nucléaire avec Israël, qui est le «cancer» pour les mollahs qui se sont solennellement engagés à le rayer de la carte, voici ce que disait le célèbre «modéré», Hashemi Rafsandjani, le jour du sermon Al-Qods à l'université de Téhéran, le 14 décembre 2001 : « Une bombe atomique ne laisserait rien en Israël, alors que la même chose produirait juste des dommages dans le monde musulman. » M. Rafsandjani, qui est un ancien président de l’Iran, est le mentor du président actuel, Hassan Rouhani, que d'aucuns célèbrent comme un esprit «modéré.» (2)

La troisième considération fondant l’ancien consensus était la conviction que même si les mollahs pouvaient être dissuadés d’utiliser la bombe, son acquisition entraînerait inévitablement une course à l’arme nucléaire au Moyen-Orient. Parce que les régimes sunnites en Arabie Saoudite, en Egypte, et ailleurs dans la région sont tous terrifiés à la perspective d'être supplantés et pris en otage par un Iran gouverné par leurs ennemis ancestraux chiites. Ces régimes se précipiteraient pour se doter de leur propre arsenal nucléaire. (3)

Une telle course aux armements augmenterait considérablement le danger que ces armes puissent être déclenchées par accident. Le colonel à la retraite, Ken Allard, ancien doyen du National War College, a expliqué pourquoi, la semaine dernière, dans le Washington Times : « Même avec l'apport constant procuré par la technologie, les États-Unis et l’URSS ont eu beaucoup de chance que leurs systèmes de sécurité évitent une explosion accidentelle. Qu'en serait-il des forces nucléaires de l'Iran, de l'Arabie Saoudite ou de l’Egypte ? S’ils construisent de telles armes, vont-ils investir aussi dans les technologies de sécurité et avoir une discipline exemplaire pour éviter le pire de tous les malheurs de l'homme ? » (4)

De même que presque tout le monde était convenu que l'Iran devait être empêché d'acquérir une capacité nucléaire, il y avait un consensus sur le fait que cela ne pourrait se faire que grâce à une combinaison judicieuse de diplomatie et de sanctions. Pour être sûr de l’empêcher, il y avait ceux qui, comme moi, faisaient valoir que le seul moyen efficace était de brandir un gros bâton. (5) Mais nous avons été largement battus par les pacifistes qui, cependant, ont volontiers reconnu que la menace d'une action militaire était nécessaire à la réussite de leur stratégie.

Pourtant, comme les années passaient, il devint clair, même pour les partisans de cette stratégie, que les Iraniens ne seraient arrêtés ni par des sanctions plus dures, ni par des négociations sans fin. On aurait pu s'attendre à les voir admettre, avec toutes les réticences que l’on peut imaginer, que le seul recours restant à leur disposition était la menace d'une action militaire. Pourtant, alors qu'ils affirmaient que « toutes les options sont sur la table», il était devenu clair que les dirigeants politiques occidentaux, ainsi que les think-tanks traditionnels et les commentateurs officiels, n’avaient pas l'estomac pour choisir l'option militaire, s’ils l’avaient jamais eu un jour...

Et c'est ainsi qu'a commencé le processus de ce que le colonel Allard appelle «apprendre à aimer la bombe iranienne ». (6)

La première étape a consisté à émettre des doutes sérieux au sujet de l'ancien consensus. Oui, les Iraniens étaient déterminés à construire une bombe, et oui les mollahs étaient des fanatiques islamistes, mais, à la réflexion, il y avait de bonnes raisons de penser qu'ils ne sont pas vraiment suicidaires, comme le prétend Bernard Lewis. De ce fait, il y avait aussi de bonnes raisons d’abandonner l'idée qu'il serait impossible de prévenir et de contenir l’Iran, comme nous l'avions fait auparavant avec les Soviétiques et les Chinois qui étaient beaucoup plus puissants.

C’est ce nouveau consensus qui a préparé la voie à l'accord conclu par les six grandes puissances avec l'Iran à Genève le mois dernier. Le gouvernement Obama nous dit que cet accord intérimaire va amener l'Iran sur une voie de garage, avec l'abandon de sa quête en faveur d'un arsenal nucléaire. Mais les Iraniens sont en liesse car ils savent que le seul abandon en cours est celui de notre propre effort pour les empêcher d'obtenir la bombe.

Les adeptes du nouveau consensus voudraient nous faire croire qu’il ne reste que deux options : une guerre pour empêcher l’Iran d’avoir l’arme nucléaire ou une politique de containement (7) [endiguement], qui serait, in fine, la seule option pour contrer un Iran nucléaire. Pourtant, en tant que défenseur non-régénéré de l'ancien consensus, je reste convaincu que le containment est impossible. D'où il s’ensuit que le seul choix qui s'offre à nous n’est pas une guerre ou une politique de containment, mais une guerre conventionnelle maintenant ou une guerre nucléaire plus tard.

Étant donné la probabilité infime que le président Obama envisage une action militaire, même s’il affirme ne pas disposer d’une autre option, le seul espoir repose sur Israël. Si celui-ci ne parvient pas à le frapper maintenant, l'Iran aura la bombe. Et quand il l’aura, les Israéliens seront obligés de décider s'il leur faut attendre une attaque nucléaire de la part de l’Iran pour envisager, s’il reste encore quelque chose dans leur pays, une hypothétique riposte, ou de mener une frappe nucléaire préventive. Mais les Iraniens seront confrontés au même dilemme. En raison de ces circonstances extrêmes qui n’ont jamais été testées auparavant, il faudra peu de temps avant que l'un d'eux ne tente de battre l'autre par une attaque nucléaire préventive.

Je conseille donc aux promoteurs du nouveau consensus de considérer les horreurs indicibles qui s’ensuivraient non seulement pour Israël et l'Iran, mais aussi pour l'ensemble de la région et au-delà. La destruction serait bien pire que toutes les conséquences imaginables d'une frappe conventionnelle israélienne, aujourd'hui, quand il y a encore une chance de mettre un arrêt temporaire, ou éventuellement définitif, à l’effort incessant de l'Iran pour se doter de la bombe nucléaire.

Norman Podhoretz

Notes du traducteur

(1) Dans la guerre de tranchées opposant l’Irak à l’Iran, qui a duré huit ans entre 1980 et 1988, les officiers fanatiques de la révolution iranienne utilisaient des enfants et des adolescents comme cobayes pour avancer sur des champs minés afin de permettre à leurs troupes de progresser de quelques dizaines de mètres.

(2) Les adeptes du nouveau consensus pratiquent une politique de l’autruche qui bat des records de cécité et de lâcheté. Dans son manifeste Mein Kampf, qu’il écrivit en 1924, alors qu’il était emprisonné après le putsch raté de Munich, Hitler n’évoque jamais la « solution finale » (extermination du peuple juif), qui ne sera décidée secrètement qu’à la conférence de Wannsee, le 20 janvier 1942, alors que les hostilités étaient déclenchées depuis trois ans. Dans l’affaire iranienne, la destruction d’Israël est annoncée à l’envi par les mollahs iraniens. A cet égard, le comportement de Chamberlain et de Daladier était moins coupable que celui du président Obama. C’est ce que l’histoire jugera un jour.

(3) Le prince Alwaleed bin Talal l’a dit, de manière discrète, au Wall Street Journal (source : article de Bret Stephens intitulé : « Pire que Munich »).

(4) Les partisans de l’Iran disent qu’il est injuste que des pays arabes n’aient pas, comme d’autres, accès à la bombe nucléaire. Quant on sait que l’on est passé tout près d’un catastrophe nucléaire avec les Russes et les Américains à cause d’erreurs humaines ou de défaillances techniques, il est fou de multiplier les risques avec des gens irrationnels pour qui la vie humaine n’a aucune valeur, ai-je envie de leur répondre.

(5) Dans le monde occidental, où règne le « politiquement correct », les gens courageux comme Norman Podhoretz sont ringardisés. Le monde occidental va bientôt mourir de cette propagande qui refuse de nommer les choses par leur nom.

(6) C’est une référence au film de Stanley Kubrick de 1964 « Docteur Folamour, ou comment j’ai appris à ne plus m’en faire et à aimer la bombe ». Il montre comment l’erreur d’un ordinateur pousse un général paranoïaque, sur une base militaire en Alaska, à lancer, avec un escadron de bombardiers stratégiques, une attaque nucléaire sur l’URSS.

(7) La doctrine du containment (endiguement) fut élaborée, en 1946, par le diplomate américain George Kennan pour contenir l’avancée du bloc communiste. C’est la même politique que l’on devrait mettre en place aujourd’hui pour stopper l’islam qui rêve de conquérir le monde et ne s’en cache pas. Mais y-a-t-il un homme d’Etat de la trempe de Harry Truman pour nous sauver de la dhimmitude qui nous pend au nez ?


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