Présidentielle : ils sont
candidats … à nous ruiner !
Les journaux et les médias sont remplis des états d'âme des divers
concurrents à la future élection présidentielle, ce qui est étrange pour des
personnes qui sans doute ne croient guère à l'existence de l'âme. Une double
certitude ressort de l'examen des programmes des divers candidats présumés
ou réels qui se ressemblent tous. Les projets préparent la double ruine. La
première ruine viendra de la persistance probable des déficits publics,
aucune mesure crédible n'étant prévue pour les éviter vraiment. La deuxième
ruine résultera de la poursuite sans pitié du déluge de lois qui démantibule
la France depuis bien longtemps. Quand un candidat, quelle que soit sa
couleur apparente, nous annonce 80 propositions, c'est bien un ouragan
législatif avec les conséquences négatives de cette seule perspective.
Devant l'immense danger, il est nécessaire de s'attarder un peu sur ce
déluge.
D'abord dans l'organisation de la France telle qu'elle est, une loi n'est
jamais complète avant de multiples « dépendances » : décrets d'application,
circulaires, interprétations jurisprudentielles et usage de recours divers
éventuels allant parfois jusqu'à l'Europe. Si les lois ont besoin de
dépendances, c'est parce qu'elles s'inscrivent dans une galaxie d'usines à
gaz. Du temps de Chirac une codification a abouti à 61 codes avec 10
millions de mots ! Il y a des chances pour que depuis lors d'autres paquets
de lois soient apparus avec d'autres millions de mots. Il est donc
nécessaire de raccorder les nouvelles lois à ces millions de mots, ce qui
implique ces « dépendances », et bien entendu jamais l'on arrivera à la
véritable clarté. En France, il est impossible d'exercer n'importe quelle
activité sans encourir le risque d'être englouti par ce véritable tsunami.
Les explications
Dans l'énoncé des programmes, les futurs fabricants de lois dénoncent, pour
se justifier, des aspects désolants du désastre français comme pêle-mêle :
la dégradation du pouvoir d'achat, le chômage, les retraites insuffisantes,
les délocalisations, etc. Il y a lieu alors de rappeler le principe des
calamités qui s'énonce ainsi : « Quand les Hommes de l'État ont créé une
première calamité, et, dès lors que cette première calamité devient trop
visible, ils en créent une deuxième pour corriger la première et ainsi de
suite ». Les futures lois dont ils nous menacent s'inscrivent dans ce schéma
mais ils se garderont bien de préciser que les calamités innombrables
viennent justement des politiques socialisantes que tous les gouvernements
ont pratiquées depuis des décennies.
Une autre cause de la déferlante se situe dans la multiplication du nombre
des ministres, car un ministre n'existe que s'il déclenche des lois. On se
souvient de ce Premier ministre qui avait prétendu juger l'activité des
ministres en les notant justement sur leur aptitude à faire voter des lois.
A l'activité incongrue des ministres, dont beaucoup sont inutiles, s'ajoute
celle des parlementaires : avoir une loi portant son nom revient à
bénéficier d'une publicité dont personne n'a jamais essayé de calculer la
valeur, qui doit être grande.
Les catégories de lois
Une loi qui n'a pas reçu ses dépendances est une loi inapplicable, une sorte
de loi en suspens : les exemples sont permanents. Il y a des lois qui
n'auront jamais leurs dépendances : ce sont des lois mortes aussitôt que
nées ; les experts comptent que, depuis 2007, peut-être 30 % des lois votées
sont ainsi des lois mortes-nées.
Il existe des lois inapplicables car inintelligibles, et la lecture des
rapports de la Cour des comptes est édifiante à cet égard. Un grand nombre
sont contradictoires avec d’autres et certaines sont rétroactives : le droit
fiscal en est peuplé et le budget 2012 en prépare. Il faut compter avec les
lois en mouvement perpétuel, ce qui est le cas des nombreuses lois sur le
logement.
Il y a plus fort encore, ce sont les lois en « coma avancé » : en effet, une
foule d'organismes sont aux aguets pour détruire les lois après coup, ainsi
le Conseil d'État ou le Conseil constitutionnel. L'Europe est embusquée avec
la Cour de Luxembourg en dernier recours. Quand le coma se réalise
effectivement, parfois au bout de longues années, il est rétroactif : la
République a inventé la mort rétroactive ce qui, pour des partisans de la
culture de mort, est finalement assez logique.
Chirac a innové en avril 2007 avec la loi « pantomime ». Il a déclaré devant
le prompteur qu'il allait promulguer une loi, mais qu'il demanderait tout
aussitôt au gouvernement de mettre en chantier une nouvelle loi qui
pratiquement détruirait celle que son auguste main allait parapher : nous
nous trouvons une fois de plus devant une grosse farce.
L’effet de paupérisation
L'influence très négative sur la richesse de la nation de tout ce micmac est
dramatique.
Ces gens, qui ont la bouche pleine des prétendus droits de l'homme, ignorent
ou feignent d'ignorer que le premier droit, non de l'homme, mais des hommes
est la sécurité juridique. L’absence de sécurité juridique conduit à
l'arbitraire et au totalitarisme. Les citoyens-esclaves ne s'y retrouvent
pas et les fabricants de la loi, seuls connaisseurs de la jungle, agissent
selon leur bon plaisir, allant jusqu'à asservir la justice à leur profit.
En attendant que la loi soit complétée par ses dépendances, entreprises et
particuliers sont en suspens et une foule de projets sont arrêtés purement
et simplement, ce qui est une cause importante de la paupérisation du peuple
français. Le temps d'attente peut être fort long et prolonger l'incertitude
sur les investissements : le va-et-vient public actuel en attente des
derniers « réglages » de la nouvelle fiscalité du patrimoine est
véritablement tragique.
Seuls les spécialistes sont capables de fournir des avis valables sur
certaines lois, et les entreprises sont condamnées à des honoraires inutiles
pour naviguer dans cet océan sans rivage. Ne pas oublier l'obligation pour
les dirigeants de consacrer une partie de leur temps à ce sujet et parfois
de prendre des décisions anti économiques sous la pression des lois.
La paupérisation de la France, c'est-à-dire plus généralement l'effet de
ruine, n'est pas du tout due au hasard mais à des causes très précises. A ce
titre, la rafale des lois est comparable aux mines antipersonnel qui
éclatent sous les pas du promeneur dans certaines régions du globe en
détruisant tout.
Madame Thatcher
À l'égard de l'ouragan législatif et de bien d'autres calamités, les
perspectives de l'après 2012 paraissent plutôt sombres, car la classe
politique française est figée dans les mêmes postures depuis longtemps.
Certains pays pourtant ont su bouger. Avant Thatcher, la Grande-Bretagne
était empêtrée dans des problèmes bien plus redoutables que ceux de la
France d'aujourd'hui et était promise au déclin. Nous ne savons pas si la
célèbre baronne a freiné l'ouragan législatif. En tout cas, elle a sauvé le
navire en perdition et ses successeurs, quels qu'ils soient, ont poursuivi
sur sa lancée.
Michel de Poncins
|