www.claudereichman.com |
A la une |
24/11/09 | Michel de Poncins |
Taxe professionnelle : le chaudron fiscal bouillonne ! Donc, notre leader bien-aimé a décidé un beau matin de supprimer la taxe professionnelle. L'enfer fiscal français qu'il alimente largement au feu de son imagination débordante est toujours pavé de bonnes intentions. Apparemment, en effet, la suppression de la taxe professionnelle seraitjustifiée ; au risque de surprendre les lecteurs, nous allons voir en fait qu'elle ne l'est pas. En outre, si l'on voulait réellement la supprimer, il fallait agir autrement. Dès l'annonce de l'événement, les courtisans se sont activés de multiples manières. Les uns, pour ne pas être en retard dans la flagornerie, ont salué le prétendu génie de la mesure. Les autres ont dû dans la hâte actionner leurs méninges pour imaginer comment remplacer cet impôt qui finance une grande partie des budgets des collectivités locales. Des promesses mensongères ont été tout aussitôt lancées dans le public : les ressources perdues par les collectivités locales seraient retrouvées à l'équivalent par la création de nouvelles taxes ou par des transferts étatiques. C'est une promesse structurellement mensongère car, dans les usines à gaz incroyables du système fiscal français, personne ne sait jamais où va exactement l'argent et d'où il vient, cela, malgré tous les jeux d'ordinateurs possibles. Les phrases idiotes ont fleuri : nous savons que, s'il détruit les industries, le socialisme est expert dans la fabrication de telles phrases. Un énarque a dit : « La suppression de la taxe professionnelle assure l'avenir de la France » (sic). Un politique a renchéri : « Cette mesure sera un accélérateur de la sortie de crise » ! Le projet de budget en préparation pour l'exercice 2010 comporte déjà, à ce titre, un article 2 de 235 pages avec 1257 alinéas. Et, comme personne n'est sûr de ce qui sortira au finish du chapeau présidentiel, il est déjà des députés et des sénateurs pour avancer qu'il faudra corriger le tout lors de l'inévitable loi de finance rectificative. Ainsi va la France, nageant sur l'océan de l'incertitude juridique et fiscale comme quelqu'un qui s’englue au piège d'une marée noire. C'est dire l'intensité du désordre introduit par le bon plaisir présidentiel. Nous ne sommes nullement, bien sûr, des fidèles de l'enfer fiscal français, mais ce n'est certainement pas une bonne méthode que de toucher à quoi que ce soit avec tant de légèreté. Les budgets des collectivités, et en conséquence tous ceux de leurs fournisseurs, sont aujourd'hui dans le flou le plus total. Parallèlement, le bon plaisir présidentiel impose la réforme de ces collectivités territoriales et superpose au chaos précédent le bouleversement résultant de ce projet de réforme. Cela part aussi d'une bonne intention mais, dès lors que, grosso modo, les compétences de ces collectivités territoriales seront maintenues et éventuellement amplifiées par des regroupements, la racine du mal, à savoir la possibilité et le quasi devoir de dépenser, sera toujours là. Depuis ce remue-ménage, de nouvelles collectivités sont apparues ici ou
là. Et, surtout, le même et super actif président
s'est dépêché de prévoir la création d'une nouvelle,
magnifique et superbe collectivité : le « Grand Paris
». Ce projet, s'il vient au jour, repose sur l'idée chimérique de
concurrencer les grandes métropoles mondiales. Il ne s'explique,
comme souvent, que par l'avidité des futurs
détenteurs des fromages gigantesques L'embrouillamini introduit par la perspective du changement dans les collectivités s'entremêle donc avec celui qui provient de la suppression de la taxe professionnelle. C'est le désordre au carré en quelque sorte : il est tel que les lecteurs non avertis de la presse ne peuvent absolument rien comprendre aux discussions techniques qui s'instaurent et qui ressemblent au débat sur le sexe des anges dans la lointaine et défunte Byzance. Ce rappel, au reste, n'est pas sans intérêt, car les querelles ont facilité à l'époque l'arrivée des Turcs qui ont tout ravagé. Plusieurs remarques finales doivent être formulées. D'abord des coûts phénoménaux ont été engendrés par la prétendue future réforme. Dans l'incertitude de tous les comptes publics, nous ne saurons jamais leur montant. Ils sont d'autant plus importants qu'ils concernent des personnes normalement intelligentes qui pourraient créer de la richesse au lieu de galoper dans les palais nationaux à la recherche de chimères inconsistantes. Il est mensonger de dire que la taxe professionnelle nuit aux entreprises et que sa suppression les sauvera. Elle n'est pas la seule à nuire, car aucun impôt n'est bon et tous les impôts sont mauvais. Les futurs impôts qui remplaceront la taxe professionnelle nuiront aux entreprises de toutes les façons, soit directement quand elles les paieront, sont indirectement quand ce sont leurs clients ou leur personnel qui les paieront. Cela n'empêchera pas les organisations patronales, complices comme toujours de ces comédies, de se réjouir pour avoir obtenu à l'arraché telle ou telle petite faveur. Personne n'a parlé de la suppression nécessaire des dépenses au niveau
des collectivités locales, qui est pourtant
l'essentiel. Rappelons que ces collectivités locales,
dont l'importance s'est considérablement accrue suite
aux deux décentralisations, sont largement
à l'origine de la paupérisation de la France.
Supprimer les dépenses c'est d'abord supprimer les montants extravagants qui
profitent aux élus et aux dirigeants de ces collectivités
locales. C'est aussi tailler dans le vif de leurs activités soit
inutiles Ce bon scénario est exclu avec le personnel politique en place. En astronomie, un trou noir ne rend jamais la lumière qu'il arrive à capter. Pour bien montrer que la culture de la dépense publique est une de ses « valeurs », le pouvoir annonce fièrement qu'avec l'argent emprunté principalement aux étrangers il va prochainement jeter une brassée de milliards dans le trou noir des universités ! Michel de Poncins
|