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La retraite d'un haut fonctionnaire représente un capital de 10 millions d'euros : Gare à l'impôt sur la fortune !

21/5/05 Charles Gave
Comparons, d'une part, la situation d'un haut fonctionnaire qui prend sa retraite à soixante ans et touche 50 000 euros par an avec, d'autre part, celle d'un entrepreneur ayant fait fortune à l'étranger.
Le haut fonctionnaire a une retraite qui est parfaitement indexée sur l'indice des prix de détail et il n'a pas eu besoin de cotiser à quelque organisme privé de retraite. Sa retraite lui est payée par la collectivité nationale, à laquelle il s'est sacrifié toute sa vie, et ce sont nos impôts, ceux des fonctionnaires et les miens, qui vont lui assurer sa rente.
Imaginons que notre entrepreneur qui a fait fortune hors de France veuille terminer ses jours au pays.
Question: de quelle fortune devra t il disposer pour avoir 50 000 euros par an de revenus?
Réponse: il existe dans les marchés financiers un outil, les obligations indexées sur l'indice des prix de détail, qui permet de faire ce calcul.
Le rendement actuel de ces obligations est de 2% (réels), garantis par l'État, tout comme la rente de notre fonctionnaire.
Avec ce taux de rendement de 2%, il faut pour obtenir 50 000 euros annuels un capital minimum de 2,5 millions d'euros. À ceci près que surgit immédiatement un léger problème: avec un capital de 2,5 millions d'euros, notre entrepreneur devra payer un impôt sur la fortune de 1 %, c'est-à-dire 25 000 euros. Il ne lui restera plus, dès lors, que 25 000 euros de revenus.
Faudrait il qu'il ait un capital, non pas de 2,5 millions d'euros mais de 5 millions d'euros ? Ce capital à 2% de rendement lui rapporterait 100 000 euros. Nouveau problème: à ce niveau là, il va payer 1,5 % d'impôt sur la fortune, soit 75 000 euros et il ne lui restera toujours que 25 000 euros...
En fait, il lui faudrait un capital de 10 millions d'euros (il paierait 150 000 euros d'impôts, et il lui resterait 50 000 euros, le but recherché). Sur ces 50 000 euros, il va payer ensuite, bien entendu, l'impôt sur le revenu... Mais le haut fonctionnaire aussi.
On peut difficilement imaginer un système plus propre à amener notre entrepreneur à prendre sa retraite à Londres, Genève ou Bruxelles: à capital égal, son niveau de vie sera quatre fois supérieur...
En termes économiques, on peut donc dire que la valeur actualisée, après impôts, de la rente de notre fonctionnaire " vaut " 10 millions d'euros.
Partisan de plus de justice sociale, je me permets de faire une proposition.
Tout le monde sait que monsieur Juppé a déplafonné l'impôt sur la fortune, lui qui avait promis de le supprimer. Moins de gens savent que le même Juppé, en apprenant que les fonctionnaires allaient prendre leur retraite à un âge plus avancé en raison de la réforme Raffarin, avait immédiatement pris la sienne, celle d'inspecteur général des Finances, tout en touchant ses émoluments de maire de Bordeaux, de député, de président de Région...
Comme tout un chacun le sait, quand un fonctionnaire fait de la politique, en faisant don de sa personne à la France, sa carrière continue d'avancer de façon imperturbable, et si, par hasard, il est battu aux élections les électeurs sont naturellement ingrats , il est immédiatement réintégré au rang où il se serait trouvé s'il était resté tranquillement dans l'administration. Sa prise de risque est donc nulle. Le premier décret que signa François Mitterrand après son élection fut celui où il nommait Valéry Giscard d'Estaing, président sortant, inspecteur général des Finances … De Gaulle avait, lui, refusé toutes formes de retraites, excepté sa pension de colonel. Autres temps, autres moeurs...
Ma proposition est donc celle ci: que l'on réintroduise dans la valeur des actifs de chaque fonctionnaire la valeur actualisée de la retraite qu'il va toucher, et que ce montant soit soumis à l'impôt sur la fortune. Comme on le fait pour notre entrepreneur.
On imagine le hourvari! Je plaisante évidemment. Pourtant, cette mesure serait parfaitement conforme à la fois à la justice sociale, aux lois de l'égalité devant l'impôt, à la logique économique et, bien entendu, aux Évangiles...

Charles Gave

(Extrait de Un libéral nommé Jésus, Bourin Editeur).

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