www.claudereichman.com


Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme

A la une

6/10/09 Ivan Rioufol

Non, l’Etat ne peut acheter les cancres !

Payer les élèves pour qu'ils aillent à l'école ? Cette idée absurde et révoltante n'a pas suffi à freiner le gouvernement, qui met le doigt dans un engrenage scandaleux. Depuis ce lundi matin, trois lycées professionnels de l'académie de Créteil expérimentent la mise en place d'une "cagnotte" collective (qui pourra atteindre 10.000 euros) destinée à récompenser l'assiduité d'une classe à problèmes. Ces sommes pourraient financer des permis de conduire ou des voyages de fin d'année.

L'initiative de Martin Hirsch, Haut-commissaire à la Jeunesse, veut lutter contre l'absentéisme. Le recteur explique: "Notre expérimentation est aux antipodes de l'individualisme consumériste". Reste que la logique d'une telle économie aboutit à ceci: depuis 2008, au Royaume-Uni, 200.000 élèves de familles défavorisées sont déjà payés de 11 à 33 euros par semaine pour aller en cours.

Que des responsables politiques, dont Luc Chatel, nouveau ministre de l'Education, en arrivent à soutenir de telles aberrations en dit long sur leur désarroi et leur manque de repères face au désastre éducatif. Personnellement, j'avoue avoir du mal à comprendre comment l'idée d'un tel marchandage mercantile au cœur de l'école, sanctuaire de la gratuité, a pu franchir les obstacles de la prise de décision. Proposer de l'argent en guise de gratification n'a plus rien de commun avec les bons points et les médailles de jadis. C'est la plus basse des flatteries, celle de l'intérêt matérialiste, qui est ici encouragée, avec le risque évident d'être généralisée aux autres lycées, au nom de l'égalité et de la non discrimination.

Distribuer de l'argent aux cancres les moins assidus est un moyen commode de ne pas regarder de plus près les causes de l'absentéisme dans certains établissements. Or, cette réalité pose des questions complexes, à commencer par la démission de certaines familles, plus ou moins bien intégrées. Le laxisme des règlements intérieurs des lycées est un autre problème qu'il faudrait regarder de plus près. Mais c'est le contenu des programmes qui mériterait très certainement d'être revu pour ces élèves inadaptés au fonctionnement scolaire, construit sur le très critiquable collège unique.

En tout cas, il est urgent que le gouvernement suspende cette mesure corruptrice et indigne.

Ivan Rioufol

 

Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme