La justice rend les maires complices de
l'immigration clandestine !
L'indifférence que portent, depuis des lustres, les dirigeants de la
France aux problèmes posés par l'immigration de peuplement est une source
d'incompréhension populaire. Celle-ci explique, en partie, la méfiance
croissante des Français vis-à-vis des élites. Observer, ces jours-ci, le
gouvernement se poser en rempart contre la grippe A, que le professeur
Bernard Debré qualifie de "grippette pas dangereuse" (Journal du Dimanche,
hier), fait ressortir l'inadéquation des réactions des politiques et leur
peu de goût pour évaluer la gravité des problèmes.
Comme le dit le professeur Debré, parlant de ce label H1N1 qui mobilise l'Etat:
"Il est inutile d'affoler les populations, sauf à vouloir leur marteler,
à des fins politiques, le message suivant : bonnes gens, dormez sans
crainte, nous veillons sur vous". Au point que le président de la
République, qui a fait un malaise hier durant son footing, en est épuisé.
Ce renoncement à maîtriser l'immigration familiale extra-européenne (sujet
qui ne préoccupe pas davantage Dominique de Villepin qui, dans Le
Parisien d'hier, ne voit comme chantiers majeurs que "l'emploi,
l'innovation et la lutte contre les déficits"), s'illustre bien avec
l'injonction de la justice, appuyée par le cabinet du ministre de
l'immigration, au maire de Loudéac (Côtes d'Armor) de marier, aujourd'hui
même, un couple d'étrangers dont l'un est en situation irrégulière, sous le
coup d'une reconduite à la frontière. "Je suis persuadé qu'il y a
tricherie. J'ai une obligation vis-à-vis de ma conscience", m'explique,
citant Victor Hugo, Gérard Huet, le maire sans étiquette, qui avait appelé à
voter François Bayrou. Joint par téléphone, il me dit recevoir de nombreux
soutiens de la population et se défend de toute xénophobie. Si le député UMP
Marc Le Fur s'est rangé à ses côtés, le PS et le Modem locaux critiquent sa
position, qui avait été contestée initialement par la Ligue des droits de
l'homme.
Les faits: Adil Doubi, de nationalité marocaine et bénéficiant d'un permis
de séjour espagnol, veut épouser, à Loudéac, Safadi Kamar el Ahjji, de
nationalité maroco-espagnole. Mais la municipalité constate un défaut de
visa pour Doubi et un faux en écriture sur une attestation sur l'honneur de
présence effective en France. Un arrêté de reconduite à la frontière est
alors délivré par le préfet des Côtes d'Armor, pour situation irrégulière.
Doubi a un mois pour quitter le territoire, l'échéance tombant le 26 juillet
2009.
La municipalité soupçonne un mariage de complaisance et fait état d'une
déclaration à ses agents du service d'état civil dans laquelle l'homme dit
solliciter le mariage pour bénéficier des aides sociales. La Ligue des
droits de l'homme est saisie par les demandeurs qui contestent le refus du
maire de procéder au mariage. Sollicité par ce dernier, le cabinet d'Eric
Besson fait savoir l'obligation de marier des étrangers qui en font la
demande, sans que l'élu ait à apprécier la régularité de la situation. Le
procureur de la République ordonne à Gérard Huet de publier les bans, en
ajoutant : "Votre position est susceptible de constituer une infraction
d'abus de pouvoir".
C'est donc ce lundi, en fin d'après-midi qu'un adjoint au maire de Loudéac
procédera à ce mariage (pressé par une astreinte judiciaire de 1000 euros
par jour), malgré la situation irrégulière de l'un des intéressés, malgré le
soupçon d'une union de complaisance et malgré, de surcroît, la non
déclaration d'un enfant de quatre ans. "Je suis écoeuré", commente
Gérard Huet, qui refuse néanmoins de faire célébrer ce mariage en mairie.
C'est dans une salle communale que la cérémonie devrait avoir lieu, tout à
l'heure. "C'est la victoire du droit. La justice a dit qu'un maire n'est pas
au dessus des lois", a commenté l'avocat des futurs époux. Le député Marc Le
Fur a beau jeu de faire remarquer qu'avec une telle décision, la justice
rend les maires complices de l'immigration clandestine. N'est-ce pas, en
effet, tout simplement scandaleux ?
Ivan Rioufol
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