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11/2/08 |
Claude Reichman |
Sarkozy en perdition ! On n’a jamais vu, sous la Ve République, un président perdre pied aussi vite. Neuf mois se sont écoulés depuis l’élection du 6 mai 2007 et Nicolas Sarkozy, en chute libre dans les sondages, ne sait déjà plus à quelle branche se raccrocher. Ne seront surpris que ceux qui ne connaissaient pas le personnage. Un bon connaisseur l’avait dit à quelques semaines du premier tour : « Si les Français savaient qui il est, il ne pourrait jamais être élu président de la République. » Le mot est de Dominique de Villepin, qu’on peut évidemment suspecter de partialité. Mais ce jugement était également celui de beaucoup de spécialistes du monde politique. Et aussi de beaucoup de Français lucides qui n’ont voté Sarkozy qu’à défaut d’un autre candidat plus convaincant et par rejet de Ségolène Royal. Toute la carrière de Nicolas Sarkozy s’est faite sur fond d’arrivisme, d’absence de scrupules et de propension à trahir. Ses convictions sont un peu plus solides : il est plutôt libéral tout en ne rejetant pas toute forme d’étatisme et de dirigisme. Mais sa réflexion n’est jamais allée au-delà de ce positionnement sommaire. En particulier il n’a jamais tenté de déterminer et de mettre en forme les mesures concrètes à prendre pour faire sortir la France du corset collectiviste et administratif qui l’étrangle. C’est la raison fondamentale de son actuel échec. Sa campagne présidentielle s’est déroulée sur le thème de la rupture. Une majorité d’électeurs a compris que c’est avec les règlements, les charges et les impôts qu’il s’agissait de rompre. Rien de tel ne s’est fait depuis neuf mois, et les Français sont de plus en plus nombreux à penser que rien de tel ne se fera. Ils ont évidemment raison si l’on veut bien admettre que Sarkozy n’a jamais été que le candidat du système, chargé de le rendre un peu moins inacceptable mais sans en modifier la structure. Une entreprise gorbatchévienne, avions-nous dit dès que sa candidature avait pris forme. Rien n’indique que nous nous soyons trompés. Sont venues s’ajouter à cette déception fondamentale de l’opinion une vie privée où le mauvais goût le dispute à l’ostentation et au dérèglement et, cerise sur le gâteau, des pratiques de Bas-Empire, comme on vient de le voir à Neuilly, où le favori de l’impératrice déchue périt sous le poignard du fils d’un premier lit de l’empereur. Il faudrait un Racine pour en faire une tragédie, mais il ne s’agit que des mœurs publiques dépravées d’un régime agonisant. Pour la France, cette situation est grave. Le pays a compris que les politiciens au pouvoir n’ont pas plus de solutions à proposer que les opposants du système. Du désenchantement, ils vont bientôt passer à la colère, puis à la recherche d’hommes et de femmes capables de tirer la France de l’ornière et dignes de cette mission de très haute responsabilité. En somme, il va s’agir de faire ce que toutes les révolutions accomplissent : le remplacement d’une caste faillie par une nouvelle élite. Cette recherche peut prendre du temps et s’accompagner de redoutables soubresauts, mais les peuples ne peuvent pas mourir et ils finissent toujours par se doter de dirigeants dignes de ce nom. Formons un souhait : que cette chute aux enfers de la gouvernance française s’accomplisse sans tarder. Plus tôt commencera le redressement, moins il sera long et difficile ! Claude Reichman
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