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1/11/11 John B. Taylor
      Les Etats-Unis d’Obama entraînent le monde
                     dans la mauvaise direction !  

Après la Deuxième Guerre mondiale, les États-Unis ont favorisé la croissance économique internationale en s'appuyant sur le marché, mais les temps ont changé.

Lorsque le président Obama rencontrera ses homologues des autres pays du G20 à Cannes cette semaine, le leadership américain sera malheureusement absent.

Lors de la dernière réunion, il y a un an à Séoul, le G20 a rejeté les demandes du président Obama pour une relance keynésienne. Il a recommandé une réduction du déficit budgétaire et prôné un retour à une politique budgétaire saine. Et lors de ce voyage, Obama a défendu une politique monétaire expansionniste de la Réserve fédérale (quantitative easing), qui est critiquée par les pays émergents parce qu’elle entraîne des flux volatiles de capitaux et des pressions inflationnistes.

Avec une faible reprise, retardée par une législation en faveur de la santé, une dette qui explose et des menaces perpétuelles de hausse des impôts, les États-Unis ne sont plus en mesure de mener le monde.

En revanche, dans les années qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale, les États-Unis ont entraîné le monde dans une croissance économique forte en s'appuyant sur le marché, sur la limitation de la taille du gouvernement et sur une politique budgétaire et monétaire non-discrétionnaire. Il a été créé un système commercial ouvert à travers l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (G.A.T.T) qui a réduit drastiquement les droits de douane. Le miraculeux redressement de l’Europe et du Japon provient de l’adhésion à ces principes de liberté économique qui étaient soutenus par les États-Unis.

Après avoir déraillé avec des politiques interventionnistes dans les années 1970, l'Amérique a remis en ordre sa maison dans les années 1980 avec l'adoption d’une politique de croissance qui a duré jusqu’à la fin des années 1990. Encore une fois ses idées économiques étaient contagieuses, non seulement en Grande-Bretagne sous Margaret Thatcher, mais dans le monde en développement. En voyant les avantages de la liberté économique par rapport à l'intervention étatique, Deng Xiaoping a créé une économie de marché dans son pays. Les États-Unis ont aidé les pays d’Europe centrale et orientale à mettre en œuvre des réformes fondées sur le marché, et il ont encouragé d'autres pays et les institutions financières internationales à faire de même en Afrique et en Amérique latine.

Comme les États-Unis se sont éloignés de la liberté économique en promouvant à sa place un interventionnisme budgétaire et monétaire associé à davantage de réglementation fédérale, leur leadership a baissé. Certains peuvent se féliciter de ce déclin, mais il n'est bon ni pour le monde ni pour les États-Unis.

La politique économique menée en Amérique touche le monde de façon subtile. Dans le cas de la politique monétaire, par exemple, les décisions sur les taux d'intérêt prises par les banques centrales étrangères sont influencées par les décisions de la Réserve fédérale en raison de la taille de l'économie américaine. Si la Fed tient son taux d'intérêt trop bas pendant trop longtemps, alors les banques centrales dans d'autres pays devront maintenir les taux bas aussi, créant ainsi des tensions inflationnistes. Si des banques centrales étrangères résistent, les capitaux affluent dans leurs pays à cause des rendements plus élevés. Cela provoque une envolée de leurs monnaies et une asphyxie de leurs exportations. (1)

A cause de la Fed, la Banque centrale européenne a maintenu ses taux d'intérêt à court terme trop bas dans la zone euro entre 2003 et 2005. Les économistes de l'Organisation de coopération et de développement économiques (O.C.D.E) ont révélé que ces faibles taux en Europe ont été la cause de la bulle immobilière en Grèce, en Irlande et en Espagne. Comme lors de tous les booms insoutenables, des risques excessifs associés à des prêts bancaires hasardeux ont conduit à l’explosion de la bulle et à d'énormes dettes publiques pour renflouer les banques. Les emprunts publics excessifs et les bilans des banques sont la source de la crise actuelle en Europe qui, à son tour, fait peser une hypothèque sur les États-Unis.

Certains pays, dont le Mexique et le Brésil, se plaignent que la Fed exporte l'inflation avec un taux d'intérêt proche de zéro et par un rachat massif de la dette publique. Et quand l'inflation se propage, comme c’est le cas dans de nombreux marchés émergents, elle s’auto-entretient par une hausse des prix des produits commercialisés dans le monde. Avec un chômage élevé, le résultat sera la stagflation - croissance atone conjuguée à une forte inflation - comme c’était le cas dans les années 1970. Pour le salut du monde et pour le sien, l'Amérique doit faire preuve de leadership en retournant à une saine politique monétaire et budgétaire.

Le leadership de l’Amérique est également essentiel pour définir le rôle du gouvernement dans une économie mondiale où la Chine joue un rôle important. Malgré l'énorme succès des réformes de Deng Xiaoping, le système économique chinois ne respecte toujours pas certains principes fondamentaux de la liberté économique. Tout en s'appuyant sur le marché, la Chine a un faible état de droit et impose encore de nombreux obstacles au libre-échange. Le gouvernement chinois favorise certaines entreprises au détriment d’autres, le capitalisme de copinage dans ses procédures d'achat, et il exige un partenariat des sociétés étrangères avec des entreprises publiques chinoises, en transférant de la sorte la technologie à des concurrents potentiels.

Le gouvernement américain devrait prévenir les politiques interventionnistes, mais cela est impossible si l'Amérique s’oriente dans cette direction. Et il aura une influence de moins en moins grande s’il continue à s'écarter d’une politique budgétaire saine en s’endettant auprès des négociateurs assis à la table.

La prochaine réunion du G20 aura lieu à Mexico en 2012, mais la date exacte n’est pas encore fixée. Dans l'intervalle, les élections de 2012 en Amérique promettent d'être un référendum sur le rôle du gouvernement dans l'économie. Si les États-Unis renouent avec la liberté économique, ils seront en mesure de réaffirmer leur leadership qui profitera à l'économie mondiale et à leur propre économie dans un cercle vertueux.

John B. Taylor

(1) La Suisse est malheureusement victime de son orthodoxie monétaire




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