www.claudereichman.com |
A la une |
25/3/23 | Claude Reichman |
Macron fera-t-il tirer ?
Est-ce que M. Macron a conscience de la situation de la France ? Est-ce qu’il la comprend ? Est-ce qu’il a idée de ce qu’il faut faire pour l’améliorer et préparer son avenir ? Autant de questions qu’on ne devrait normalement pas se poser. En principe, un président de la République, même s’il n’est pas un génie, doit pouvoir répondre à ces questions. Or, alors que M. Macron est président depuis six ans, on a le sentiment qu’il ne sait pas où il est ni où il va. Ce ne sont pourtant pas ses discours qui ont manqué. Pas un jour sans qu’il ne nous ait asséné ses vérités. Mais tout cela a été si contradictoire et si confus que le peuple ne sait toujours pas ce que pense vraiment son président, et encore moins ce qu’il veut faire. En revanche on a compris sa personnalité et son caractère. Et cela inquiète. La principale caractéristique de M. Macron, c’est sa certitude d’avoir toujours raison. Et c’est un véritable drame. Car la politique dans le monde actuel est faite d’approximations successives et non de diktats. Se refuser à la pratiquer ainsi, c’est se condamner à l’échec. On nous rétorquera que M. Macron donne le spectacle d’une grande variabilité dans ses propos et ses actes. Mais ce sont des variations sur son propre thème. Il ne s’enrichit d’aucun apport extérieur et ses échecs ne sont pour lui que des agressions contre sa personne. Un tel homme ne devrait pas faire de politique. Malheureusement, il en fait. Et il a même réussi à se faire élire à la faveur d’un véritable complot judiciaire qui a mis hors jeu le favori. De ce fait la France a un président mal élu et mal approprié à sa fonction. Alors quand il s’est agi d’aborder le problème des retraites, qui non seulement plombe l’équilibre financier du pays mais aussi menace près de vingt millions de retraités de voir fondre leurs pensions comme neige au soleil, M. Macron s’est noyé dans un projet de réforme fait de rustines, dont certaines, comme la prolongation du temps d’activité, ont fait l’effet d’une provocation. C’est dire à quel point le peuple ignorait la situation de son régime de retraite. La retraite est une conséquence de l’industrialisation au dix-neuvième siècle, qui a transformé les agriculteurs en ouvriers. D’un système destiné à leur assurer une vie décente à la vieillesse, on a fait un attribut démocratique. Et surtout le système de répartition, adopté dans la plupart des pays marqués par le socialisme, est devenu un moyen de tenir le peuple en laisse. On ne peut s’empêcher de s’étonner que l’être humain ait pour ambition suprême de faire de ses semblables des prisonniers. Nous savons que l’esclavage existait dans toutes les sociétés antiques, mais au vingt et unième siècle … Il faut s’y faire, c’est probablement génétique. Mais la génétique n’est pas une clause absolutoire. L’homme vaut moins par ses pulsions que par sa façon de les dominer. Le collectivisme, qu’il soit communiste, socialiste ou technocratique, est à bannir. La liberté doit être le maître mot des sociétés modernes. Il en est souvent l’emblème, mais il y a tout aussi souvent très loin du mot à la pratique. Les combattants de la liberté ont fort à faire en France. Ils se réduisent à un petit groupe dont la plupart des membres sont des universitaires qui sont par obligation fonctionnaires. Cela n’enlève rien à leur sincérité, mais cela ne les encourage pas à prendre des risques. Les autres doivent faire face aux difficultés d’une société cadenassée par l’impôt, les charges et les règlements, et cela limite leur liberté d’action. Si bien que le pouvoir, confortablement installé dans son lit d’apparat, se rit des demandes de liberté et examine les libelles d’un derrière distrait. Jusqu’au jour où, sans plus de raison que la veille, le peuple se rebelle. On a ainsi nombre de révoltes et de jacqueries, mais les révolutions sont plus rares. Surtout quand on regarde celles qui ont réussi. Pourtant, à chaque révolte, le peuple croit que c’est la bonne. Et déchante le lendemain. Si bien qu’il est difficile de savoir dans quelle catégorie ranger les protestations et surtout de prévoir leur avenir. Tel est le cas avec l’actuelle crise des retraites en France, qui a d’ailleurs changé de thème en cours de route pour se transformer en chasse au Macron. Parviendra-t-elle à chasser son gibier de l’Elysée ? Nul ne le sait. La seule certitude est que les chasseurs n’ont aucune considération pour le président de la République et nourrissent même une véritable haine à son endroit. Le pouvoir est à la merci d’une maladresse supplémentaire ou d’un hasard malencontreux. Mais la menace est forte. Le rideau de police qui protège Macron peut être enfoncé par une charge populaire. C’est pourquoi l’ancien préfet de police de Paris a déclaré, à propos des manifestations des gilets jaunes, qu’« on a frôlé l’ouverture du feu ». On peut craindre que Macron soit prêt à s’y résoudre ! Claude Reichman
|