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21/1/18 Claude Reichman
     
       Nous avons été torturés au tribunal de Paris
                         dans un procès truqué !

J’étais convoqué au tribunal correctionnel de Paris, en ce mois de janvier 2018, en même temps que Jennifer Landry, Philippe Letertre et Laurent C., pour répondre du délit présumé d’incitation à ne pas s’affilier à un régime obligatoire de sécurité sociale.

Cette citation à comparaître émanait du Parquet, sur dénonciation du directeur de la sécurité sociale et du président du TASS de Paris. L’accusation se fondait sur des réunions que nous avions tenues partout en France et au cours desquelles nous indiquions dans quelles conditions la loi permettait de s’affilier à un organisme européen d’assurance en lieu et place de la Sécurité sociale, ainsi que sur des articles et des déclarations que nous avions faites sur le même thème. C’est l’article L 114-18 du code de la sécurité sociale qui constituait le fondement de l’accusation.

Cet article, je le connais bien, puisqu’à sa promulgation en 1995, les médias l’avaient baptisé « la loi anti-Reichman ». Cette loi était destinée à me faire taire. Elle violait toutes les dispositions européennes qui avaient supprimé le monopole de la sécurité sociale, ainsi que la signature de la France qui avait approuvé ces textes par la signature du président de la République, François Mitterrand.

Je protestai vivement auprès de la Commission européenne, qui finit par obliger la France à modifier son texte, afin de le rendre conforme à la législation communautaire. Le nouveau texte, publié en 2006, ne disait plus qu’il était interdit d’inciter les assujettis à refuser de s’affilier à un organisme de sécurité sociale français, mais seulement à UN organisme de sécurité sociale. Celui-ci pouvait donc être européen, ce qui rendait le texte conforme aux directives européennes et aux lois françaises qui les avaient transposées. Il n’existait donc plus aucun risque de poursuites pénales pour les partisans de la liberté de la protection sociale.

L’affolement du RSI et de l’URSSAF face au désengagement massif des Français de la Sécurité sociale les poussa, en 2015, à saisir la justice pour tenter de nous opposer cette loi pourtant inapplicable à notre cas, puisque nous avions toujours dit et répété qu’on ne pouvait quitter la Sécurité sociale sans contracter une assurance européenne s’y substituant.

Le Parquet, en France, est aux ordres de l’Etat. Malgré la stupidité de telles poursuites, il les mit en œuvre, et sans autre mesure d’instruction qu’une enquête préliminaire bâclée, nous convoqua devant le tribunal correctionnel de Paris.

Nous avons dû subir trois journées d’interrogatoires qui sont à elles seules un véritable scandale. On fouilla dans notre vie privée, dans notre famille, dans nos revenus, comme si nous étions de redoutables criminels. Puis on nous demanda pendant des heures si nous pensions que la Sécurité sociale avait un monopole et si nous considérions que notre action était justifiée, comme si les trois juges qui nous faisaient face ne connaissaient pas la loi, que nul n’est pourtant censé ignorer. Puis ce fut au tour des avocats du RSI (pourtant supprimé), de l’ACOSS et de l’agent judiciaire de l’Etat, qui s’étaient portés parties civiles, de nous cuisiner et de nous insulter. Des heures et des heures de pression incessante, debout face à des juges confortablement assis.

Quand vint mon tour, je décidai de rompre avec cette intolérable procédure. Et je passai à l’attaque, indiquant avec une force que décuplait mon indignation, que nous n’avions rien à faire dans un tel tribunal, et demandant aux juges qui ils étaient pour avoir le droit de nous juger. Car enfin, entre eux et nous, qu’un simple barre séparait, il y avait plus que de la distance : un fossé infranchissable. Nous n’étions pas du même monde, eux de la race des seigneurs, et nous de celle des manants. Eux avec leur rémunération garantie, leur avancement, leur protection contre toute critique, et nous avec les 9 millions de pauvres que compte la France et les 15 millions de compatriotes qui ne s’en sortent pas, avec nos professions pourtant vitales pour le pays mais massacrées par l’Etat.

Pendant deux heures, dans un silence de mort, j’apportai toutes les preuves de l’abrogation du monopole, produisant un document officiel de la Commission européenne, une circulaire interne de la direction de la sécurité sociale, un communiqué de la direction du marché intérieur de la Commission, l’arrêt du 16 décembre 1999 de la Cour de justice européenne condamnant la France pour non application des directives de 1992.

Aucune de ces preuves accablantes ne fit l’objet de la moindre question, du moindre démenti de la part des juges, du procureur et des caisses de sécurité sociale. Le ciel leur était tombé sur la tête !

Mais le moment le plus fort fut quand j’accusai le parquet d’avoir truqué la citation à comparaître en y introduisant une référence à l’article L.111-2-2 du code de la sécurité sociale (qui établit l’obligation de s’affilier à celle-ci) alors qu’elle ne figure pas dans l’article L 114-18 en vertu duquel nous étions poursuivis ! Comment les juges n’ont-ils pas immédiatement mis en exergue ce faux grossier ? Ils étaient sans doute trop occupés à préparer notre condamnation.

Je terminai mon intervention par ces simples mots : « Nous n’avons rien à faire dans ce tribunal. Nous avons toujours dit et écrit qu’il est obligatoire de s’assurer à un organisme de sécurité sociale français ou européen. Ce procès ne devait pas durer plus de 5 minutes. Pour nous, il est désormais terminé ! »

Il n’empêche que nous avons été littéralement torturés pendant trois jours, au mépris des droits de l’homme, et qu’une telle expérience marque à jamais l’âme de tout honnête citoyen traité comme un délinquant par la justice de son pays.

Claude Reichman

 

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