Nous n’aurons pas longtemps à attendre !
Curieux pays que la France. Si fière d’elle-même et si acharnée à se
ridiculiser et à se nuire. Vraiment, nous avons un problème. Au stade de
France, en ouverture de la coupe du monde de rugby, nous avons eu droit à
une saynète ridicule avec un acteur orné d’une casquette (un Français
quoi !), et à une Marseillaise massacrée par une chorale d’amateurs. Et tout
çà alors que nous avons une garde républicaine qui est ce qui se fait de
mieux au monde et des supporters qui adorent chanter en chœur au son des
trompettes ? Heureusement, nos rugbymen ne se sont pas mis à l’unisson de la
médiocrité et ont vaincu les terribles All Blacks, un peu émoussés mais
toujours redoutables.
Pour le reste, c’est exactement la même chose. Nos médias et nos politiciens
sont obsédés par le climat (au moins en paroles), alors que nous ne polluons
pratiquement pas, ayant sacrifié nos usines à la Sécurité sociale. Notre
industrie automobile va devoir se mettre au tout électrique, de façon à
permettre aux Chinois de la réduire à néant, et la Commission européenne va
mettre la touche finale à la crise du logement en rendant indésirables les
« passoires thermiques » qui, si peu protectrices qu’elles soient, nous
permettent encore de ne pas habiter dans la rue.
Et c’est sans parler de notre dette. Les Français détenteurs d’une assurance
vie peuvent se préparer à n’être jamais remboursés, car les banques et les
assurances qui les leur ont fait souscrire ont immédiatement versé leur
pécule à l’Etat qui en avait le plus grand besoin pour dépenser sans
compter. En échange un petit bout de papier leur fait croire qu’ils ont
encore des droits sur leur argent. Bien entendu les prêteurs étrangers, eux,
seront remboursés, car sinon c’en est fini des emprunts français. Ainsi va
la confiance dans un monde où elle est toujours trompée.
On ne s’étonnera donc pas de la bordée de sifflets qui a accueilli Macron au
stade de France. Ne pas le siffler eût été une insulte à la nation. Après
tout ce qu’il leur a fait, c’était bien le moins que les Français pouvaient
se permettre. On vante la Constitution de la Ve République qui confère au
pouvoir une grande stabilité. A ceci près que c’est la stabilité de la
déconfiture. Le général de Gaulle en était bien conscient qui, quand il
sentit que la confiance du peuple se dérobait, fit en sorte de lui permettre
de s’exprimer et tira la leçon du désaveu en quittant le pouvoir. Les
sondages donnent à Macron un conseil identique. 74 % des Français veulent un
référendum sur les retraites, autant sur l’immigration, 70% affirment que le
président n’est pas ouvert au dialogue et 76% qu’il n’est pas proche des
préoccupations de Français (sondage Odoxa, Le Figaro). Et malgré cela,
Macron ne rêve que d’un troisième mandat !
Macron est usé jusqu’à la corde. Il n’y a plus rien à attendre de lui, sauf
de nouvelles erreurs, et encore plus de déclarations intempestives. La
Belgique a démontré récemment qu’un pays peut vivre une année sans
gouvernement. Mais pas quatre ans ! Alors que faire ? Rien d’autre qu’une
pression telle qu’elle deviendra irrésistible. Il y faudra autant de
détermination que de patience. Mais c’est ainsi. Un pays n’est pas un bolide
de course. Il lui faut du temps pour se mettre en mouvement.
Mais surtout il faut qu’enfin nous réfléchissions sur la façon dont nous
voulons vivre. Notre pays est bardé d’institutions politiques et sociales
qui le paralysent. Une assemblée nationale de 200 députés serait bien
suffisante et surtout permettrait aux parlementaires de s’épanouir et de se
préparer à gouverner le pays. Le système de retraite est une folie dans une
économie mondialisée. Il stérilise chaque année 350 milliards d’euros qui,
avec une retraite par capitalisation, enrichirait le pays en favorisant
l’investissement. Et surtout la retraite devrait rester individuelle et
accompagner le cotisant pendant toute sa vie active, quelles qu’en soient
les modalités. « Enrichissez-vous par le travail et par l’épargne. » Près de
deux siècles après que Guizot eut formulé cette injonction, il est temps de
lui donner vie. Pour le plus grand bien du peuple et de la France.
Les conseils ne manquent pas à la
France. Mais il n’y a pas grand monde pour les mettre en œuvre. Le blocage
est le fait d’un Etat qui prélève les deux tiers de la production du pays et
qui fait en sorte que rien ne puisse se faire sans lui. Et encore moins
contre lui. La réduction de ses dépenses est la clef de la situation. Le
seul domaine où elle puisse se faire sans difficulté est celui de la
protection sociale, où tout est prêt pour le changement. Les lois sont
votées, les organismes d’assurance et les mutuelles peuvent élargir
instantanément leur champ d’intervention. Et les Français, individualistes
comme jamais, ne rêvent que d’être leur seul maître. Alors qu’attend-on ?
Peut-être un choc, qui ferait l’effet d’un révélateur. Raymond Barre aimait
cette citation d’André Maurois : « Toujours l’inattendu arrive. » Je pense
que nous n’aurons pas longtemps à attendre !
Claude Reichman
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