www.claudereichman.com |
A la une |
29/1/22 | Claude Reichman |
Nous somme tous des otages !
Les Etats s’en donnent à cœur joie avec la pandémie. Ils prennent en otage tout individu qui passe à leur portée et se régalent de cet exercice. La plupart du temps, les individus sont trop faibles pour protester d’une voix audible, mais de temps en temps un otage connu ou même célèbre se rebiffe et cela s’entend. Cela a été le cas du tennisman Djokovic. Il entendait participer au tournoi open d’Australie, un des quatre principaux du monde, alors qu’il ne remplissait pas les conditions sanitaires requises. Bien entendu, il avait tort de ne pas se plier à la règle, puisque celle-ci s’appliquait à tous les joueurs. Mais ses convictions anti-vaccinales et son statut de numéro 1 mondial lui paraissaient suffisantes pour enfreindre les conditions fixées par les organisateurs du tournoi et par le gouvernement australien. Ce en quoi il se trompait doublement. Les sociétés humaines sont imprégnées de hiérarchie, et à cet égard elles sont semblables aux sociétés de chimpanzés, avec lesquels l’homme a 98 % de gènes en commun. Chez les chimpanzés comme chez l’homme, il y a des mâles et des groupes dominants. Mais cette domination est sujette à de fréquents changements, dus à l’évolution des rapports de force dans la société et entre les individus. En temps normal, dans les sociétés démocratiques, les individus se protègent le mieux qu’ils peuvent des abus de l’Etat. Certains Etats respectent assez bien les principes de liberté et de protection des droits fondamentaux de l’homme. D’autres, comme la France, s’en soucient comme de colin-tampon et obligent les citoyens à se battre sans cesse contre les abus d’autorité et les violations du droit par l’Etat. Le malheureux (mais quand même milliardaire) Djokovic a beau être l’idole de la Serbie, l’Australie lui répond qu’elle n’est pas serbe et que c’est sa loi qui prévaut. Ce qui envoie le tennisman dans un centre de rétention, qui n’est pas une prison mais un mauvais hôtel, en attendant qu’il soit statué sur son cas. La pandémie a ramené Djoko à son humble état d’individu ayant enfreint les règles. On ne pleurera pas sur son malheur (qui ne consiste qu’en un titre et des millions en moins, et une vexation en plus), mais on constatera que le gouvernement australien a pu se bomber le torse d’avoir fait plier le numéro un mondial. Ce n’est pas grand-chose, mais en un temps où les politiciens sont l’objet d’un mépris généralisé, c’est toujours bon à prendre. La plupart des gouvernements de la planète ont mis leur société sous cloche face à l’épidémie. Les restrictions de liberté ont été la règle. Certains Etats ont levé celles-ci dès qu’ils ont pu, d’autres, comme la France, clament leur volonté de protéger la santé des habitants et s’en réclament pour maintenir les contraintes au-delà du nécessaire et parfois même du raisonnable. Mais parler de raisonnable à propos d’un haut fonctionnaire français c’est parler pour ne rien dire, car la raison du technocrate est celle de l’Etat et ce dernier ne connaît que l’intérêt de son pouvoir. Les libertés rognées, voire supprimées, dans les Etats comme la France ne reviendront pas sans que les citoyens ne doivent combattre. Ces revendications devraient figurer au premier rang des programmes politiques pour l’élection présidentielle. Pour le moment, elles sont des plus discrètes et les ténors politiques « rugissent comme un rossignol », comme le disait Shakespeare. Les citoyens savent donc que leurs malheurs sont loin d’être terminés. Ce qui n’est certes pas nouveau, comme Sisyphe le savait bien. Parmi les décisions essentielles qu’un nouveau pouvoir devrait
prendre en France, il y a la suppression de la cour de cassation et du
Conseil constitutionnel. Ces deux organismes imbus de leur importance
ont massacré au fil du temps les droits fondamentaux fixés par la
Déclaration des droits de 1789, qui trône pourtant au faîte de la
Constitution française. Il faudra les remplacer par une cour suprême
qu’on prendra bien soin de ne pas peupler de fonctionnaires. Au moins
aura-t-on une chance ainsi d’avoir quelques grandes décisions qui
ramèneront la démocratie française à une vraie démocratie, et non à une
démocratie conditionnelle, comme on dit liberté conditionnelle au sortir
de la prison. Claude Reichman
|