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17/7/09 Benoît Deltombe

Trois terribles vagues risquent de déferler sur le monde !

Au 17ème siècle, un grain de sable changea le cours de l'histoire de l’Angleterre :
« En août 1658, les calculs rénaux de CROMWELL se compliquèrent d'une pyélonéphrite, puis d'une septicémie. Le décès survint le 3 septembre. »
(in « L'Anglicanisme » de Jean-Paul MOREAU, éditions L’Harmattan).

C'est pareil grain de sable qui pourrait advenir à l'économie mondiale, au cours de l'été 2009.

En effet, le dernier chiffre connu, relativement à la dette de l'Etat français (engagements in bilan), est de 1 413,6 milliards d'euros, ce chiffre devant passer à 1 660 milliards en 2010. A ceci, s'ajoutent les engagements hors bilan qui sont de deux ordres, à savoir :

- le provisionnement des pensions de retraite des fonctionnaires, celles-ci n'étant pas financées par un fonds de pension, mais prélevées, chaque mois, sur le budget courant de l'Etat, soit 1 000 milliards ;

- la dette de la Sécurité sociale, étant observé que ne sont publiés que les déficits annuels, c'est-à-dire des comptes de flux, mais jamais des comptes de stock. Quelques indices permettent cependant de l'appréhender : la dépense publique est composée à 29 % de l'Etat ; à 6 % des ODAC (organismes d'administration centrale) ; à 20 % des collectivités locales ; et à 45 % de la Sécurité sociale. L'amortissement de la dette de celle-ci a donné lieu à la création de la CADES, financée par la CSG et la CRDS ; il a ainsi déjà été titrisé 110 milliards d'euros, il est prévu d'en ajouter 80.
Cependant, ce total de 190 milliards ne représente sans doute qu'une faible partie de la dette, impossible à évaluer. Celle-ci peut par conséquent aussi bien être de 200 que de 1000 milliards.

De surcroît, en matière de fiscalité, la France est au taquet (http : www. Forbes.com/Global/2008/0407/060_2.html ; et idem /2009/0413/034-tax-misery-reform-index.html).

En outre, ce qui est préoccupant est moins la quantité que la qualité de la dette. Un récent exemple en a été donné, lors de l’audition, le 6 juillet 2009, de M. Philippe MILLS, directeur de l’Agence France Trésor, par la Commission des Finances du Sénat, dans le cadre du rapport n° 542, du 8 juillet 2009, en vue du débat, le 15 juillet, du projet de loi de règlement des comptes pour l’année 2008, adopté par l’Assemblée Nationale, le 29 juin (cf. article d’Isabelle COUET et Lucie ROBEQUAIN, « La France accroît sa vulnérabilité en empruntant à court terme », à l’adresse suivante : https://www.lesechos.fr/info/france/02058092039.

A cela, s'ajoutent les difficultés de trésorerie inhérentes à ce que l'on a appelé la crise des subprimes, à l'occasion de laquelle les instituts d'émission ont dû recapitaliser de nombreuses sociétés, tant bancaires, qu'industrielles.

Cependant, cette crise des subprimes n'est que la partie émergée de l'iceberg.

Depuis l’origine de l’humanité, les Etats se financent en taxant leurs nationaux et les empires se financent en taxant leurs états vassaux. Ont ainsi régné sur le monde, successivement le Portugal (1450 - 1530), l'Espagne (1530 - 1640), la Hollande (l640 - 1720), la France (1720 - 1815), l'Angleterre (1815 - 1920), puis, à la fin de la première guerre mondiale, les Etats-Unis d'Amérique.

Relativement à ces derniers, la domination de l'économie mondiale était facilitée, en raison du rôle du dollar, monnaie de compte dominante du commerce international, et surtout monnaie de paiement exclusive du pétrole. Le 15 août 1971, Richard NIXON a pris la décision historique de dénoncer les accords de BRETTON-WOODS (22 juillet 1944), en supprimant la convertibilité du dollar en or, à l'époque de 35 dollars pour une once (28 grammes).

Dès lors, rien ne s'opposait plus à l'augmentation de la dette des Etats-Unis, financée par une émission de monnaie, prenant notamment la forme de bons du trésor, automatiquement souscrits par les pays pétroliers, le Japon, et, à une période récente, la Russie et la Chine. C'est ainsi que, lorsque Alan GREENSPAN quittera la présidence de l'Institut d'émission, la Réserve fédérale (FED), la dette sera de 9 000 milliards de dollars ; il faut à cet égard relever une subtilité, le terme, en langue française, de « billion » représentant un millier de milliards, tandis que l'équivalent, en langue anglaise, est celui de « trillion » : en d'autres termes, un trillion anglais est le synonyme d'un billion français, soit 1x10 puissance 12.

La première décision que prendra, le 23 mars 2006, le successeur d'Alan GREENSPAN, Ben BERNANKE, sera de supprimer l'indice M3 (l'indice M1 étant la masse des dollars en circulation aux Etats ; l'indice M2 étant la masse des dollars en circulation dans les pays appartenant à la zone dollar ; et l'indice M3 étant la masse des dollars en circulation dans le monde).

Pour la conduite de ses missions, la FED dispose d'une inspection, dont l'inspecteur général est Mme Elisabeth A. COLEMAN, ayant succédé en mai 2007 à M. Barry R. SNYDER.

Le dernier chiffre connu de la dette des Etats-Unis était de 11 700 milliards de dollars, ce à quoi il faut rajouter un provisionnement, d'ici cet automne, de
1 750 milliards ; le chiffre global est donc de l'ordre de 13 450 milliards.

Dans ce contexte, un « représentant » (équivalent de nos députés) de Floride, M. Alan GRAYSON, a interrogé, sous serment, le 5 mai 2009, Mme COLEMAN sur une question inédite : le non-financement de cette dette à hauteur de 9 000 milliards. Mme COLEMAN, poussée dans ses retranchements, n'a pas démenti cette information, mais a refusé de s'expliquer. L'enregistrement de cette audition est consultable sur divers sites (youtube, metacafe, videomo), ainsi que, sous-titré en Français, sur (www.dailymotion.com), à l’adresse : "Alan GRAYSON : is Anyone Minding the Store at the Federal Reserve ?"

Cette information doit être replacée dans son contexte : M. Alan GRAYSON a, dans ses fonctions tout à la fois d'avocat et de député, été affecté par la faillite de la banque LEHMAN BROTHERS, non secourue par la FED, à l'époque « pour faire un exemple ». Cette faillite a eu des répercutions en cascade et a donné lieu à des investigations de la presse financière, notamment de l'agence Bloomberg, dont M. GRAYSON s'est fait l'écho.

Cependant s’agit-il d’un fait survenu à une date précise, soit le 5 mai 2009, la situation évoluant rapidement. Plusieurs autres indices permettent de l'appréhender :

a- le 4 juin 2009, dans la ville frontalière de CHIASSO (canton du Tessin, sur la route de Bâle à Milan), la douane italienne a intercepté deux Japonais s'apprêtant à passer en Suisse, porteurs de bons de la Réserve fédérale américaine pour une valeur de 134,5 milliards de dollars. Il tombe sous le sens qu'ils agissaient pour le compte du gouvernement japonais, soucieux d’alléger ses titres de créance sur l'Etat américain ;

b- depuis plusieurs mois, la Chine, détentrice de réserves de change pour un montant équivalent à 2 000 milliards de dollars, est en train de liquider ses positions sur la monnaie américaine, soit 1 400 milliards ; de surcroît, la Chine, après avoir offert au FMI de racheter l'intégralité de son stock d'or physique (soit 3 217 tonnes), a souscrit massivement à la première émission d'obligations de celui-ci, obligations gagées sur ce même or physique : en d'autres termes, la Chine achète de l'or-papier ;

c- le 16 juin 2009, à EKATERINBOURG (Russie), se sont tenus deux sommets. Le premier réunissait l'OCS (Organisation de coopération de SHANGHAI), réunissant la Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l'Ouzbékistan, outre divers observateurs, au nombre desquels l'Iran. Le second, tout à fait inédit, était le premier sommet du BRIC, cet acronyme réunissant les quatre pays émergents sur la scène mondiale, à savoir le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine. Initialement, les USA avaient manœuvré pour empêcher cette réunion, puis, ensuite, avaient vainement tenté d'obtenir un poste d'observateur. Cette réunion avait pour but de faire le point sur l'évolution de la situation financière internationale ;

d- le 25 juin 2009, un troisième sommet a réuni 192 pays à l'ONU sur la crise économique, à la suite de la conférence de DOHA (2 décembre 2008) et du rapport STIGLITZ, prix Nobel d'économie 2001 (8 mai 2009). Il en est résulté un triplement des moyens d'intervention du FMI, notamment des DTS.

Les DTS (droit de tirages spéciaux) sont un instrument monétaire international, créé par le FMI (Fonds monétaire international) en 1969 pour compléter les réserves officielles existantes des états membres. Le DTS est constitué d'un panier de devises, révisé tous les cinq ans, pour la dernière fois en octobre 2005. La composition actuelle du DTS est par conséquent aujourd'hui la suivante :

- dollar américain : 37,06 %
- euro européen : 38,40 %
- yen japonais : 14,20 %
- livre britannique : 10,34 %

La résolution prise lors du premier sommet du BRIC a été d'anticiper, dès 2009, la composition du DTS, afin de remplacer le dollar et la livre par le rouble et le yuan, ce qui se conçoit, puisque aussi bien, depuis 2008, le premier producteur de pétrole est la Russie (9,5 millions de barils par jour), devant l'Arabie Saoudite (9,2). Quant à la Chine, avec son 1,3 milliards d'habitants, elle est, entre autres, le premier producteur d'or.

La raison de l'actuelle tension entre l'Iran et les USA est moins la volonté de celui-là de se doter de l'arme atomique, que, surtout, le fait que, depuis le mois de février 2008, son pétrole est exclusivement vendu sur la bourse iranienne du pétrole, bourse installée dans la zone franche de l'îlot de Kish, à proximité du détroit d'Ormuz, zone franche sur laquelle sont d'ailleurs installées plusieurs entreprises appartenant à l'ancien vice-président américain, M. Dick CHENEY. Or, la monnaie de compte de cette bourse n'est plus le dollar mais le rial (100.000 rials = 7 euros), et à terme un panier de monnaies dont l'Iran peut modifier la composition. L’arme financière n’est donc comparable, dans ses effets dévastateurs, qu’à l’arme climatique (HAARP). Telle est d'ailleurs la raison de l'invasion de l'Irak, puisque aussi bien Saddam HUSSEIN avait décidé de substituer, ex abrupto, comme monnaie de compte de son pétrole, l’euro au dollar.

La devise européenne est encore prisée dans le Turkestan, à savoir l'ensemble des peuples de langue turcique, c'est-à-dire depuis la Thrace orientale jusqu'au Xinjiang (Ouïghours), en gros le sixième de la Chine : par exemple, dans les boutiques sous douane d'ALMATY (Kazakhstan), l'euro a évincé, non seulement le tenge (100.000 tenges = 477 euros), mais encore le rouble, le yuan, le dollar ou la livre sterling.

Enfin et surtout, a été constituée, voici une décennie, au sein de l'Union européenne, une structure d'analyse statistique, le « Laboratoire européen d'anticipation politique », ou « LEAP/E2020 » auquel collabore, par exemple, la Sorbonne. Ce laboratoire, dont les archives sont ouvertes à toutes les universités européennes, organise régulièrement des séminaires et édite des publications, telles que :
a- la « news letter LEAP/Europe2020 » ;
b- le « Global Europe anticipation bulletin », en abrégé GEAB.

La dernière édition de ce bulletin, n° 36, du 17 juin 2009, est consultable à l'adresse suivante : https://www.leap2020.eu/GEAB-N-36 -est-disponible!-Crise-svstemique-globale-Le-choc-cumule-des-trois-vagues-scelerates-de-l-ete-2009_3341 .html. 

Or, ce bulletin prévoit, pour l'été 2009, la conjonction de trois vagues, à savoir :
1) la vague du chômage massif ;
2) la vague déferlante des faillites en série ;
3) la vague de la crise terminale des bons du trésor américains, du dollar et de la livre, ainsi que du retour de l'inflation.

Selon ce laboratoire, ce qui est préoccupant est, moins la survenue de ces trois vagues, que, surtout, leur synchronisation, et précisément au cours de l'été 2009.

Dans ce contexte, si cette hypothèse se réalise, la crise systémique globale en résultant, partant des Etats-Unis d'Amérique, aura nécessairement des effets collatéraux en Europe.

Quelles conséquences peut-on en anticiper ?

En premier lieu, un effondrement du cours du dollar, et par contre-coup, de la livre sterling, peut-être jusqu'à 90 % ; ensuite, une accélération de la crise économique dans tous les secteurs, auquel il ne pourra être obvié que par la remise à plat du système monétaire international. Or, si vous voulez comprendre l’Iran, allez à Aubusson : l’hommage rendu par Alexandre à Darius est célébré dans tous les ateliers de restauration, preuve du prestige de l’Empire perse au Grand Siècle ; les Russes sont des joueurs d'échecs ; quant à la Chine, c'est cinq mille ans d'histoire, dont 70 ans de communisme, l'une des civilisations les plus raffinées, son maître à penser est Confucius (551 - 479 avant notre ère), contemporain de Périclès (495-429). Une fois que l'once d'or, artificiellement plafonnée à 740 dollars, sera montée à 2 000 dollars, si ces deux pays proclament de concert la convertibilité de leurs devises respectives en or, rien ne s'oppose à leur substitution dans le panier de monnaies composant les DTS.

Surtout, le choc sera moins financier, que psychologique ; le dogme de l' « american way of life » volera en éclat, discréditant le « Code Hays » des élites politiques et médiatiques.

En veut-on quelques exemples ?

Essayez d'expliquer à un Secrétaire d'Etat à l'économie numérique qu'en remplaçant les ordinateurs actuels, modèle Napoléon III, par des machines plus modernes, on peut, pour un coût modique, booster la croissance et réduire la pathologie du travail, c'est peine perdue.

Essayez d'expliquer à un Ministre de la Santé qu'en se conformant avant la fin de l'année 2009 au droit communautaire européen qui abroge le monopole de la sécurité sociale, on s'épargnera de menus soucis, c'est peine perdue, etc.

Le plus surprenant viendra cependant peut-être des PED (pays en voie de développement). L'application de l'art. L 311-33 du Code français de la consommation permet par exemple de passer d'une dette de (- 30 000 francs) à une créance de (+ 94 000 francs), chèque en main.

Or, la dette des pays du sud, envers les pays du nord, était de 70 milliards de dollars en 1970, et de 3 360 milliards en 2007; entre 1980 et 2007, le total des remboursements a été de 7 150 milliards ; les PED ont donc remboursé 102 fois ce qu'ils devaient en 1970, mais entre-temps leur dette a été multipliée par 48.

De même, on appelle transfert net sur la dette la différence entre le service de la dette (remboursement annuel, en principal et intérêts, aux pays industrialisés) et les sommes perçues sous forme de prêts pendant la même période.

Le transfert net sur la dette extérieure publique à long terme en 2007 était de 18,9 milliards de dollars ; le total cumulé pour la période 1985-2007 s'est élevé à 759 milliards de dollars.

Par comparaison, le Plan Marshall pour l'Europe après la seconde guerre mondiale a été de 100 milliards de dollars.

Pour la période 1985-2007, le transfert net sur la dette extérieure publique des PED, soit 759 milliards de dollars, signifie qu'en 23 ans, l'équivalent de 7,5 Plans Marshall a été envoyé du sud vers le nord ; rien qu'en 2007, ces pays ont remboursé 18,9 milliards de plus que ce qu'ils ont reçu.

Il faut donc envisager la rédaction d'un Code de la consommation à l'usage des PED, en s'inspirant de BOILEAU dans « L'art poétique » :

« Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement
   Et les mots pour le dire arrivent aisément ».

Benoît Deltombe

 

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