www.claudereichman.com


Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme

A la une

16/11/11 Wall Street Journal
                Ne misez pas sur les technocrates !

C'est une version du rêve européen. En Italie et en Grèce ces derniers jours, les dirigeants élus ont été remplacés par des technocrates qui ont fait leur carrière en dehors de la politique et même en dehors de leur propre pays. Peuvent-ils réussir là où les politiques ont échoué ? Ne misez pas sur eux.

En Italie, l’économiste universitaire Mario Monti a été invité par le président Giorgio Napolitano à former un gouvernement après la démission du Premier ministre Silvio Berlusconi. M. Monti est surtout connu pour ses dix ans passés à la Commission européenne à Bruxelles où il a servi d'abord comme commissaire pour le Marché unique et, plus tard, en tant que commissaire de la concurrence. Les Américains se souviennent encore que c'est M. Monti qui a saboté la fusion entre General Electric et Honeywell en 2001 et condamné Microsoft à une amende de 497 millions d’euros pour des infractions à une loi antitrust douteuse en 2004. Mais il a aussi tenu tête aux banques des landers en Allemagne pour les empêcher de recevoir des subventions publiques.

Pourtant, si M. Monti a été inflexible à la Commission, il a été également dégagé de toute responsabilité politique dans les décisions qu’il a prises. Ce ne sera pas le cas à Rome où il sera impuissant, à moins qu'il ne gagne le soutien du Parlement qui passe son temps à se quereller et à faire tomber les gouvernements. Les premiers signes montrent que son soutien parlementaire est ténu.

Il n’est pas évident qu'il obtienne une majorité de votes pour abattre l'article 18 d’une loi du travail tristement célèbre en Italie. En vertu de cette loi, les entreprises de plus de 15 salariés sont effectivement interdites de licencier leurs travailleurs. Les syndicats et leurs compagnons de route de la gauche italienne ont déjà lancé une mise en garde au nouveau gouvernement de ne pas toucher à l’article 18 au risque de provoquer de graves troubles sociaux. M. Monti n’a pas caché ses ambitions au cours du week-end quand il a déclaré que son travail n'était rien moins que la restauration de la «santé de la situation financière» et le «retour à la croissance», tout en «prêtant attention à l'égalité sociale. " Les objectifs de M. Monti sont-ils conciliables ?

La Grèce, quant à elle, a remis les rênes du pouvoir à Lucas Papademos, également économiste universitaire de formation, qui a récemment servi comme vice-président de la Banque centrale européenne à Francfort. Il est largement apprécié et respecté pour l’instant. Mais si la carrière de M. Papademos nous raconte quelque chose, c'est un engagement ferme à baisser la tête en évitant les controverses. Ces qualités peuvent être des recommandations pour une carrière de technocrate mais elles ne serviront pas M. Papademos à Athènes, où les 18 derniers mois écoulés ont été particulièrement violents.

La tâche de M. Papademos est à la fois plus difficile et plus urgente que celle de M. Monti. La Grèce n’a que quelques semaines pour éviter de faire défaut sur sa dette, à moins qu'elle ne reçoive un autre paquet de 8 milliards d’euros de l'UE et du F.M.I. avant Noël. Pour obtenir cet argent, elle a besoin d’obtenir du Parlement grec son accord au plan de sauvetage du 27 octobre dernier. C'est plus que son prédécesseur, le socialiste Georges Papandréou, a été capable d'accomplir.

Selon les plans actuels, M. Papademos doit rester Premier ministre seulement jusqu'au début de l’année prochaine. En un laps de temps aussi court, ce sera un défi pour M. Papademos de faire davantage que de maintenir la Grèce à flot.

Un dernier mot s'impose au sujet de ces nouveaux gouvernements de technocrates en Europe. Ce sont les «experts» à Bruxelles et au F.M.I. qui ont ordonné les prescriptions économiques qui ont saigné à blanc l'économie grecque. Si l'Italie et la Grèce continuent sur la voie de la hausse des impôts sans une réforme significative du marché du travail, aucun apport d'ingéniosité bureaucratique ne pourra les sauver du naufrage ainsi que le reste de la zone euro.

Wall Street Journal


Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme